Publié le Jeudi 14 mai 2015 à 13h55.

Renault Trucks : « Le dogme de la marge et du court terme »

Entretien. Après les 508 emplois du PSE de 2014, voici les 591 emplois du PSE de 2015... Les actionnaires d’AB Volvo n’en finissent pas d’exiger des mesures pour accroître la « profitabilité ». C’est que leur revenu est en jeu : pour toucher leurs dividendes, il faut maintenir les profits à niveau. Leur méthode : diminuer les coûts en faisant payer le prix de cette politique aux salariés. Et, à court terme, ça marche bien pour eux. Les résultats du premier trimestre 2015 le prouvent. Selon le rapport officiel du groupe, le bénéfice a atteint 457 millions d’euros au premier trimestre 2015, presque quatre fois plus qu’au premier trimestre 2014. Matthias Martins et Arnaud Jeanne, syndicalistes SUD chez Renault Trucks (groupe Volvo) du site de Blainville-sur-Orne (Calvados) ont répondu à nos questions suite aux récentes annonces du groupe portant sur les suppressions d’emplois.

Un nouveau plan de suppression de postes qui vient juste après celui de 2014. Toujours pour augmenter la « profitabilité », comme le dit la direction ?Ce mardi 28 avril a marqué encore une étape sombre pour l’emploi chez Renault Trucks, avec l’annonce d’un second plan social qui touche principalement le site de Lyon, avec un impact important sur les activités commerciales.L’addition était déjà sévère, avec 500 emplois CDI de supprimés et près de 800 prestataires en 2014, et les 591 du plan 2015. Sans compter les emplois en sursis dans Renault Trucks de Volvo IT. En tout cela fait 1 900 emplois supprimés en 2014 et 2015 !Cette décision pourrait s’avérer néfaste pour la marque Renault Trucks, en sacrifiant au travers de l’emploi les savoir-faire de l’entreprise. Pour nous, c’est une preuve de plus que la dominante stratégique de Volvo ne change pas : c’est le dogme de la marge et du court terme. Le conseil d’administration décide de la baisse « des coûts fixes et variables », c’est-à-dire les salariéEs, pour continuer à marche forcée la politique des marges. Cette politique a déjà coûté des parts de marché, des pertes de rémunération pour les ouvriers (chômage, prime de poste, intéressement...) et des emplois (PSE, départs non remplacés, précarité…).

Quelle est la situation financière du groupe ?Les cabinets Secafi et Syndex ont présenté leur expertise économique effectuée avant l’annonce du second PSE du 28 avril. Dans les grandes lignes, il apparaît nettement que la situation économique s’améliore, même si d’après les « marchés » donc les analystes financiers, les objectifs ne sont pas atteints. Les vraies performances à retenir sont 283 milliards de couronnes (environ 2,83 milliards d’euros) de chiffre d’affaire en 2014 contre 270 milliards de couronnes en 2013 (environ 2,7 milliards d’euros), soit un bon niveau de trésorerie et une dette en retrait avec des commandes en hausse !Cette annonce s’inscrit donc clairement dans une logique boursière avec comme objectif immédiat la rentabilité au profit des actionnaires. Si personne ne s’en était encore aperçu, Volvo est sous le joug de financiers, agences de notation et autres actionnaires qui, pour arriver à leurs fins, pratiquent le mensonge en disant « les résultats ne sont pas bons », le chantage, « il faut réduire nos coûts, ceux de nos concurrents sont meilleurs », ainsi que la menace : « votre note sera dégradée et vos emprunts vous coûteront plus cher » ! Ces pratiques s’appellent du racket et les conséquences sont payées directement par les salariéEs !

Seule la division commerciale serait touchée, surtout à Lyon. Ici, à Caen, comment envisager une riposte commune ?La direction prend la responsabilité d’hypothéquer l’avenir. En s’attaquant au site lyonnais c’est bien toute la structure organisationnelle de l’entreprise qui est impactée.En termes de riposte, pour l’instant, seul SUD a fait un appel à débrayer sur la journée du 30 avril et la CFDT a appelé à 1 heure en fin de poste. La CGT et la CFE/CGC n’ont pas appelé. À Lyon, un appel des cinq organisations syndicales est prévu le lundi 11 mai à 10 h 30 pour interpeller la direction lors de la réunion du CCE.Sur Lyon des contacts sont pris avec des politiques, et pour nous, sur la région, on réfléchit aussi à la manière d’interpeller les politiques.