Le déficit affiché de Renault est largement le résultat d’opérations comptables.
Le grand écart, entre une perte de 141 millions d’euros pour 2019 et un gain de 3,3 milliards d’euros pour 2018, est dû à trois grands postes.
Opérations comptables et jeux d’écriture
Tout d’abord, la baisse des dividendes fournis par Nissan à Renault qui en est actionnaire. Les dividendes versés sont passés de 1,5 milliard d’euros en 2018 à 0,242 milliard d’euros en 2019, soit une baisse de 1,3 milliard d’euros. S’y ajoutent des baisses des contribution d’autres entreprises dont Renault est aussi actionnaire, en particulier d’entreprises chinoises. Cette perte par rapport à 2018 est d’environ 0,5 milliard d’euros. Il y a donc une perte de 1,8 milliard d’euros due à des moindres contributions ou dividendes fournies à Renault par des firmes dont il est actionnaire.
Ensuite, une baisse du résultat d’exploitation d’environ un milliard d’euros. Cette baisse est due à la baisse des ventes d’automobiles dans le monde en 2019, mais est surtout due à aux ventes des pièces moteurs à d’autres constructeurs (moteurs diesel pour Mercedes en particulier).
Enfin, une opération strictement comptable entraînant une charge supplémentaire de 753 millions d’euros « au titre de l’arrêt de la reconnaissance d’impôts différés actifs sur les déficits fiscaux en France ». En clair, cela veut dire que, les années précédentes, Renault mettait en positif dans son bilan des montants fondés sur des remboursements possibles d’impôts à venir par l’État. Et cette année Renault a considéré que ces remboursements n’auraient jamais lieu. Ces trois quarts de milliards d’euros mis en charges supplémentaires pour 2019 ne sont qu’un jeu d’écritures.
Le chiffre annoncé d’une perte de 142 millions provient donc d’une « cuisine » comptable à partir de ces différents postes. Bien sûr les dirigeants de Renault n’ont pas inventé la baisse des dividendes fournis par Nissan, mais ils ont délibérément chargé l’année 2019 et afficher ce déficit pour se défausser sur la bande Carlos Ghosn-Thierry Bolloré des menaces de fermetures d’usines proférées aujourd’hui.
Une marge opérationnelle de 2,6 milliards d’euros
Déficit ou pas, les propriétaires actionnaires vont continuer à recevoir des dividendes pour un montant total prévu de 312 millions d’euros. Sans les dividendes versés aux rentiers qui s’enrichissent en dormant, pas de déficit en 2019 !
En fait les salariéEs sont bien à l’origine des profits et des richesses créées chez Renault. La marge opérationnelle de l’activité automobile de Renault dans le monde est bien positive à hauteur de 2,6 milliards d’euros. Et cette activité automobile de Renault est fondée sur le travail de milliers de salariéEs dans les usines et les autres établissements. Mais ces 2,6 milliards d’euros représentent un taux de marge opérationnelle de 4,8 % contre 6 % en 2018, ce qui ce n’est pas assez pour les actionnaires.
Seulement 1 % d’augmentation générale des salaires pour les ouvrierEs et zéro pour les ETAM et les cadres. Tout le reste en augmentations individuelles à la tête du client dans une limite d’augmentation de la masse salariale de 2,2 %. Voilà ce qu’a proposé la direction de Renault lors des NAO de ce mois de février. Et les actions revendicatives organisées à cette occasion n’ont pas abouti à des mobilisations à la hauteur des enjeux, sauf dans quelques usines dont celle de Cléon.
« Renault n’a aucun tabou sur les fermetures d’usines dans le monde et en France », a déclaré Clotilde Delbos, la directrice générale par intérim. Combinés avec le blocage des salaires, avertissements et menaces sont clairs. Le terrain est préparé pour de nouvelles fermetures d’usines Renault en France et ailleurs.