Les Femen sont ce groupe ukrainien féminin qui s’est fait connaître pour ses actions seins nus, slogans peints sur la poitrine, et la recherche de confrontation physique. Il y a maintenant une section française qui a connu une très grande popularité médiatique ces derniers mois.Mais les médias ont relayé leurs actions bien plus pour l’attractivité de jeunes femmes, conformes aux canons de beauté actuels et à demi-nues, et pour la violence des images de confrontation, que sur le fond politique. Le débat sur les modalités de mobilisation féministe s’est ainsi déplacé vers une question dont l’enjeu est tout de même discutable : faut-il, ou ne faut-il pas, montrer ses seins quand on est féministe et qu’on veut se faire entendre ?Ce qui se joue ici, ce n’est pas tant l’existence, les modalités, ou les positions de cette organisation somme toute groupusculaire, mais le rapport des féministes – et des mobilisations en général – aux médias. Ainsi lors des mobilisations pour l’égalité des droits, a-t-on pu entendre ad nauseam que pour gagner en popularité, le mouvement devait séduire les médias, et pour cela « construire des images » ou « raconter des histoires ».Sans raccourciOr ce rapport de soumission aux desideratas médiatiques esquive deux éléments pourtant centraux. Le premier est que les médias ne sont pas neutres et appartiennent à des groupes capitalistes. On ne peut donc penser le rapport aux médias en occultant la réalité d’une idéologie dominante dont ils sont parmi les principaux propagateurs. Le second est de remettre en cause l’idée selon laquelle les médias sont nécessaires pour influencer l’opinion publique et ainsi faire pression sur les hommes politiques qui s’inquiéteraient de leur réélection. Car le raccourci médiatique ne permet ni de faire un travail de conviction à la base ni de créer des mouvements de masse auto-organisés, pourtant seuls à même de provoquer la prise en main de leur émancipation collective par les premierEs concernéEs.Chloé Moindreau
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