Le 31 décembre a officiellement pris fin la présence des troupes de l’Otan en Afghanistan, après treize années d’aventure militaire qui ont englouti plus de 1 000 milliards de dollars de dépenses pour Washington, soit plus de 800 milliards d’euros, et coûté la vie à 3 485 soldats de la coalition, et des milliers de morts aux populations...
Le dernier contingent de l’armée française engagé dans ce fiasco se retire aussi. Une fin qui ressemble à une déroute.Wait and seeSuite à un accord signé par les USA avec le nouveau pouvoir mis en place sous leur propre autorité, 12 500 soldats de la Force internationale d’assistance à la sécurité, en majorité américains, resteront sur le sol afghan dans le cadre de la mission « Soutien résolu » afin d’encadrer l’armée afghane. Parallèlement, 4 500 soldats, en majorité américains, resteront hors du cadre de l’Otan pour mener des opérations de combat, cela pour deux ans.Au lendemain de son arrivé au pouvoir, en 2009, Obama avait décidé le « surge », un renfort qui porta un temps les troupes de l’Otan jusqu’à 150 000 hommes. « Les gains tactiques de l’Otan n’ont pas été transformés en gains stratégiques », commente très sérieusement un officier occidental... pour dire que ce gigantesque déploiement de troupes baptisé « Liberté immuable » n’a fait que renforcer les talibans face à une occupation militaire insupportable pour l’immense majorité de la population.La Maison Blanche et le Pentagone sont donc contraints de reconnaître leur impasse et leur impuissance à maîtriser la situation que leur politique a engendrée... comme en Irak, en Libye, au Moyen-Orient ou en Ukraine. Ils n’ont plus qu’une politique : laisser libre cours au chaos qu’ils ont créé.
Libéralisme militariste...Les grandes puissances vont continuer de déverser des milliards, non pour aider la population mais pour fournir les troupes mercenaires. Au sommet de Newport, en septembre dernier, l’Alliance atlantique s’est engagée à financer les forces afghanes (352 000 hommes) à hauteur de 5,2 milliards de dollars par an jusqu’à la fin de 2017. Cet afflux de dollars sera bien impuissants à contenir la poussée des talibans. Ils ne serviront qu’à poursuivre une guerre dont ses initiateurs mêmes sont bien incapables de définir les buts. Pas plus que les armées, ces dollars ne réussiront à soumettre la population... et au final, cette manne financière pourrait bien finir chez les talibans.
Le chaos profite aux talibansTreize ans après avoir été chassés du pouvoir, au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, les talibans sont à l’offensive contre un pouvoir fantoche et sans autorité. Trois mois après son élection, le président Ghani et son chef de l’exécutif Abdullah Abdullah, réunis dans un incertain gouvernement d’union nationale que l’un et l’autre n’ont accepté que sous la pression des USA, n’ont toujours pas mis en place leur cabinet.Les désertions se multiplient au sein de l’armée afghane qui compte 5 000 morts pour la seule année 2014, alors que l’ISAF (la « Force internationale d’assistance à la sécurité ») avait déploré 3 500 tués en treize ans. Il se pourrait donc bien que cette armée se désagrège et qu’une partie d’entre elle passe avec armes et bagages du côté des talibans.Depuis 2002, les États-Unis ont investi plus de 104 milliards de dollars en Afghanistan, pays de 30 millions d’habitantEs, mais ces milliards n’ont en rien profité à la population, finançant principalement l’armée, les trafics qui s’organisent autour d’elle, et la corruption. C’est ce que continueront à faire les milliards déversés par les USA alors que la population connaît la misère.Les fruits sanglants de la politique des grandes puissances et du monde libéral et impérialiste en décomposition.
Yvan Lemaitre