Publié le Vendredi 8 octobre 2010 à 00h13.

Au Togo, la mentalité coloniale qui perdure

La vieille impunité coloniale n’est plus tout à fait ce qu’elle était. Parfois, il arrive que des raisons tactiques commandent à la fameuse «raison d’Etat» de prendre ses distances avec un comportement qui sent un peu trop ouvertement la mentalité colonialiste.

C’est ce qui est récemment arrivé au Togo. Un militaire français a dû apprendre la leçon à ses dépens. La scène où on voit le voit interpeller, de façon violente, un photographe-journaliste togolais, Didier Ledoux, a vite fait le tour du monde. Elle s’est déroulée le mardi 11 août à Lomé, au Togo, en marge d’une manifestation de l’opposition qui continue à dénoncer l’élection présidentielle truquée du 4 mars dernier. Au cours de la scène (vidéo sur Youtube: http://www.youtube.com/w…), on entend le militaire français apostropher le photographe togolais, le tutoiement étant de rigueur. L’officier est mécontent d’avoir été pris en photo et exige que le journaliste la supprime, puis il le menace de faire appel au régiment des commandos de la garde présidentielle, «pour foutre un peu d’ordre là-dedans», avant demander à des gendarmes togolais, qui entourent et malmènent Didier Ledoux, de «le foutre en taule». Ainsi, en marge d’une manifestation de l’opposition (contre une dictature soutenue par la France), un officier français donne des ordres à des membres des «forces de l’ordre» locales et se targue de sa position au sein de la hiérarchie de l’armée nationale.

La publicité de cet incident a fini par déranger les ministères français de la Défense et des Affaires étrangères qui ont pris rapidement leurs distances, déclarant publiquement qu’ils ne «cautionn(aient) ni le vocabulaire ni le comportement» de l’officier. Létondot a été rappelé immédiatement en France et mis aux arrêts pendant dix jours c’est-à-dire qu’il a continué à effectuer son service dans les conditions normales mais il lui était interdit, en dehors du service, de quitter sa formation ou le lieu désigné par l’autorité militaire. Le militaire, qui se voit comme une victime, a par la suite déclaré s’être « fait piéger», reconnaissant tout de même incidemment qu’il avait bien «remarqué qu’un photographe [le] prenait en train de commander aux gendarmes, et [...] cela allait être très mal interprêté». Selon lui, «ce n’était pas des menaces parce que je n’ai évidemment aucun pouvoir sur la gendarmerie togolaise.»(L’Express) Il est fini, le «temps des colonies»?

Bertold de Ryon