Xi Jinping, président chinois, est arrivé en France le 25 mars pour une visite de trois jours se concluant par une fastueuse réception à Versailles. Il inaugurait un tour européen incluant l’Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas. L’étape française marquait le cinquantenaire des relations diplomatiques entre la France et la République populaire, mais c’est bien l’économie qui constituait le plat de résistance des entretiens.
En 1964, la France avait été le premier État occidental à reconnaître diplomatiquement la République populaire. L’initiative de De Gaulle lui avait permis de se replacer dans le jeu géopolitique asiatique et de forcer, de concert avec Pékin, l’entrée du club alors très fermé des puissances nucléaires. Paris n’a cependant pas réussi à transformer l’essai sur le plan économique.La France est certes présente en Chine dans le domaine de l’aviation avec l’Airbus franco-allemand et Eurocopter ou Alcatel dans le secteur spatial, les trains à grande vitesse (Alsthom), ou l’énergie nucléaire (Areva, Alstom, EdF), l’automobile (Michelin, PSA…), l’environnement (Suez Environnement, Veolia), la construction (Lafarge), la grande distribution (Carrefour). Mais en Europe, elle reste à la traîne de l’Allemagne et ses machines-outils. Quant aux échanges commerciaux avec le géant asiatique, ils accusent un déficit abyssal de 26 milliards d’euros (soit près de 40 % du déficit commercial français total).L’Allemagne, la France et la Grande-Bretagne se disputent les faveurs des investisseurs asiatiques. Ainsi, une soixantaine de domaines viticoles ont été achetés par de riches Chinois – dans le bordelais surtout –, mais que restera-t-il demain de cet engouement passager ? Que pèsent véritablement le vin et le luxe français ? Que permettra l’entrée de Dongfeng dans le capital de PSA ?
Les limites de la politique du styloL’Élysée annonce la signature de grands contrats pour 18 milliards d’euros, mais il s’agit avant tout de « l’officialisation » d’accords déjà négociés dans l’automobile (PSA-Dongfeng) ou l’aéronautique avec l’européen Airbus : une commande de 43 appareils moyen-courriers A320 et 27 long-courriers A330. L’achat des long-courriers avait été gelé par Pékin en représailles au projet européen de taxer les émissions de CO2 des compagnies étrangères. Airbus a en outre annoncé l’extension pour dix ans de son entreprise commune avec Aviation Industry Corporation of China (AVIC) pour assembler les avions de la famille A320 dans l’usine de Tianjin. L’Européen Airbus Helicopters et l’entreprise chinoise Avicopter ont annoncé un accord portant sur la production conjointe de 1 000 hélicoptères civils EC175/AC352.Impossible, en revanche, de conclure le projet d’usine de retraitement des combustibles nucléaires usés présenté par Areva : les négociations se poursuivront… La construction de deux nouveaux réacteurs EPR à Taishan n’a pas été évoquée. Total a signé avec le pétrolier CNOOC un accord prolongeant jusqu’en 2019 la livraison de gaz naturel liquéfié (GNL) au groupe public chinois…Pas de quoi pavoiser du côté français. Le rêve chinois de François Hollande reste pour l’heure un rêve : son salut ne viendra pas de Pékin.
Pierre Rousset