Publié le Mercredi 29 janvier 2025 à 09h36.

Démondialisation de crise

La mondialisation heureuse (pour le Capital) appartient à un passé déjà lointain. La crise de la démondialisation lui a succédé, ouvrant un espace aux conflits géopolitiques entre États et à des replis protectionnistes partiels.

Cependant, on ne se libère pas facilement des interdépendances tissées par la formation d’un marché mondial unique et l’internationalisation des chaînes de production. Elles sont toujours vivaces, alors que d’autres enjeux s’invitent à l’attention des gouvernants, comme les guerres et le réchauffement climatique.

Rapport de forces avec les USA

Les premiers signaux envoyés par Donald Trump sont ambivalents. Il a nommé à des postes clés de farouches opposants à Pékin, mais a suspendu l’interdiction de TikTok. Et que penser de la place de « président bis » que semble occuper Elon Musk, ce grand investisseur et soutien de Xi qui a proposé un plan de règlement de la question taïwanaise au profit de Pékin (l’homme le plus riche du monde s’accorde tous les droits d’ingérence) ? Xi Jinping doit avoir bien du mal à prévoir si un deal sera souhaitable et possible avec Trump – pour une fois on le comprend. Est-ce un signe si sa politique reste très prudente sur le front des monnaies ? Les temps étaient mûrs pour renforcer le rôle international du yuan, il n’en profite pas pour l’heure. Le bras de fer technologique et commercial entre les deux puissances est engagé, il pourrait aboutir à l’imposition au monde d’un duopole sino-étatsunien ou, inversement, à des affrontements armés.

Les États-Unis restent dominants sur le plan militaire, ainsi que pour les semi-conducteurs de pointe. Ils exigent que le champion néerlandais des puces d’intelligence artificielle, Nvidia, renonce à livrer ses produits haut de gamme à la Chine. En dépit de subventions massives à la recherche, les entreprises chinoises semblent incapables de combler leur retard en ce domaine crucial. Du coup, Pékin menace de bloquer l’exportation vers les États-Unis de plusieurs métaux essentiels à la production des semi-conducteurs (gallium, germanium…). Vous avez dit interdépendance ?

Entre l’Europe de l’Ouest et Poutine

L’influence chinoise s’étend notablement de l’Afrique à l’Amérique latine, mais cela ne saurait remplacer les liens avec les pays capitalistes développés. Or, l’accès aux États-Unis devrait se restreindre. En conséquence, Xi Jinping pourrait se tourner vers l’Europe de l’Ouest, l’Australie, la Corée du Sud — mais il y a la guerre en Ukraine de son copain Poutine, allié à la Corée du Nord ! Est-ce le moment de sacrifier cette amitié indéfectible ? Difficile alors qu’avec le réchauffement climatique, les régions polaires s’ouvrent à l’exploitation et aux communications maritimes. Pékin n’est pas un pays riverain de l’Antarctique et a besoin de Moscou pour participer au grand jeu stratégique engagé dans cette région, à l’heure où Donald Trump veut prendre possession du Groenland !

Le sort du monde dépend pour une part de dirigeants comme Donald Trump et Xi Jinping, ce qui n’a rien de rassurant. Au chaos par en haut, opposons donc l’internationalisme par en bas.