Après le 0-0 « technique » concernant le nombre de sièges obtenus par le PP, le PSOE, Podemos et Ciudadanos (Cs) aux élections du 20 décembre dernier, ce qui pour la première fois dans l’histoire politique espagnole a entraîné l’impossibilité de former un gouvernement, il y aura donc de nouvelles élections ce dimanche 26 juin. De plus, étant donné le système électoral, IU (Izquierda Unida), avec un million de voix, n’avait obtenu que deux députés...
Tant Podemos qu’IU en ont pris note et ont conclu que beaucoup de sièges ont été perdus à gauche parce qu’ils s’étaient présentés séparément : il fallait donc se rassembler électoralement. La principale nouveauté du 26 juin est donc la présentation de la coalition Unidos Podemos (UP), produit de l’accord de ces deux formations et de la convergence de forces catalanes autour de la maire de Barcelone Ada Colau, des Mareas de Galicia et Compromis à Valence.
Tout cela a engendré d’importants espoirs dans la gauche sociale et électorale. D’un côté, le vote pour la coalition apparaît comme le vote utile pour virer le PP du gouvernement. D’autre part, malgré l’opposition à cet accord électoral du secteur populiste – disciples de Laclau et Mouffe – dans la direction de Podemos et des réticences des secteurs les plus conservateurs d’IU, tant chez les militantEs que dans les secteurs proches se réalisent des formes d’unité d’action sur la base de la campagne, débordant le seul accord « au sommet ».
Si les prévisions des sondages électoraux se réalisaient, le PP obtiendrait 28,9 % de voix, suivi d’Unidos Podemos qui, avec 24,8 %, dépasserait le PSOE et ses 20,4 % et Cs, le nouveau parti néolibéral, à 14,4 %. Les pronostics pour les partis nationalistes seraient les mêmes, et il faut remarquer qu’Unidos Podemos pourrait l’emporter au Pays basque (fait sans précédent), en Catalogne, dans les îles Baléares et à Valence.
Des trous dans le programme...
La première conséquence serait, si les résultats correspondaient à ces prévisions, une nouvelle fois la difficulté à former un gouvernement, ce qui a amené les élites financières à réclamer un gouvernement de grande coalition des forces qui soutiennent la Constitution de 1978 (PP, PSOE et Cs). La deuxième est que si Unidos Podemos a plus de voix et de sièges que le PSOE, la crise interne socialiste s’approfondira et aura des conséquences imprévisibles.
Unidos Podemos (UP) présente un programme antilibéral avec d’importants manques (par exemple, un traitement timide de la restructuration et du non-paiement de la dette publique) et qui laisse au second plan l’exigence de nouveaux processus vers une nouvelle Constitution. Cependant, aux yeux de la majorité, UP représente le pôle électoral antagonique et alternatif aux politiques d’austérité et autoritaires du PP. Expression du degré de nervosité du PP, des médias et des principaux chefs d’entreprise, ceux-ci recourent à la peur pour contrer UP. Le « modéré » ministre des Affaire étrangères José Manuel Margallo vient de déclarer à la chaîne de télé La Sexta : « Moi, qui suis un démocrate de toujours et qui ai toujours cru au pouvoir du bulletin de vote, je dis qu’il y a des fois où les électeurs se trompent. Je voudrais rappeler que M. Adolf Hitler est devenu chancelier du Reich en passant de 12 à 107 sièges »...
Au cours d’une campagne avec peu de débats et semée d’affirmations contradictoires et ambiguës de Pablo Iglesias, le sentiment populaire est que la victoire s’approche, et qu’il se formera un gouvernement de gauche cette fois ou la suivante. Un gouvernement difficile à former aux vus des résultats attendus dimanche, et qui s’il se formait, pourrait difficilement être qualifié de gauche puisque le PSOE continue à s’enferrer dans la logique du Pacte de stabilité.
Ce qui est par contre sûr, c’est que le peuple de gauche sortira renforcé des élections et que de nouvelles tâches s’ouvrent pour Anticapitalistas dès le 27 juin : avancer dans l’unité pour la prise de pouvoir par le peuple.
De Séville, Manuel Gari
(traduit par Monica Casanova)