Publié le Lundi 5 mai 2025 à 16h30.

Communiqué d’Anticapitalistas à propos de la panne sur le réseau électrique

Lundi dernier, toute la péninsule ibérique a été privée d’électricité d’un moment à l’autre. Les causes qui ont généré l’oscillation du réseau électrique sont encore inconnues, et nous devons rejeter toute désinformation et tout opportunisme à ce sujet. En ce sens, la classe ouvrière, par le biais de ses organisations syndicales et sociales, doit avoir le droit de participer à l’enquête sur les causes de l’événement. Cependant, la dimension politique de l’événement va au-delà des causes concrètes. Le débat public suscité par le black-out aura des conséquences à court et à moyen terme. C’est pourquoi nous souhaitons mettre en évidence quatre éléments contradictoires.

1. Ni le nucléaire ni les combustibles fossiles ne nous apportent la sécurité. Nous rejetons fermement toute nouvelle tentative de relance des centrales nucléaires et thermiques. Le nucléaire dépend de l’extraction de l’uranium, présente un risque permanent et nous lie à la gestion indéfinie des déchets nucléaires. De plus, lors de la panne de courant, les centrales nucléaires ont été les premières à s’éteindre et ont aggravé la situation. Les centrales thermiques génèrent une dépendance à l’égard de l’extraction et de l’importation de gaz et nous conduisent à la dévastation du climat. La seule voie à suivre est celle d’un système électrique 100 % renouvelable qui élimine les combustibles fossiles et facilite la transition énergétique dans d’autres secteurs, tels que l’industrie et les transports. Cela pose des défis supplémentaires pour la gestion du réseau, mais il existe suffisamment de solutions pour les relever.

2. La transition énergétique est urgente, et le profit privé est un obstacle. Notre système électrique a été privatisé par le biais de différentes réformes entre 1988 et 1998, ce qui a de graves conséquences pour la transition énergétique. Cette privatisation a divisé la production, le transport, la distribution et la commercialisation de l’électricité, ouvrant la porte à une initiative privée fragmentée et non coordonnée. L’opérateur du système électrique (REE) est détenu à 80 % par le secteur privé et, malgré les 20 % d’actionnariat public, son comportement est axé sur la maximisation de la distribution des dividendes. Il est donc difficile de réaliser les investissements nécessaires pour passer à un système d’électricité 100 % renouvelable. La production reste dominée par l’oligopole de l’électricité, et le développement des énergies renouvelables est guidé par la maximisation des profits. Cela signifie que l’installation se fait de manière désordonnée, en donnant la priorité aux emplacements les moins coûteux, de manière agressive sur le territoire, en générant un inconfort légitime en cours de route, et en ralentissant si l’espérance de profit est réduite. Les réseaux de distribution aux mains des entreprises privées de l’oligopole de l’électricité impliquent un manque d’investissement et d’entretien, et la commercialisation privatisée empêche de garantir l’accès à un approvisionnement de base en électricité, générant plus de 7000 décès dus à la pauvreté énergétique par an. Globalement, un système électrique privatisé est un obstacle d’échelle, de rapidité et de coordination au développement de la transition énergétique urgente.

3. La transition énergétique nécessite également d’autres transformations sociopolitiques. Au-delà du système électrique, l’abandon des combustibles fossiles nécessite des transformations beaucoup plus profondes. Cela implique de grandes batailles politiques, visant à obtenir une réduction de la demande d’énergie par la réhabilitation énergétique des logements, la réduction de la dépendance aux véhicules privés et l’expansion massive des transports publics, ou encore la transformation structurelle de l’industrie vers la satisfaction des besoins sociaux. Aucune de ces transformations n’est garantie, et sans elles, la transition énergétique ne sera pas possible. C’est pourquoi nous devons promouvoir les luttes et les conflits qui avancent dans chacun de ces domaines.

4. Il n’y a pas de temps à perdre, nous avons besoin de planification et de propriété publique. La transition énergétique urgente exige que nous nous libérions de la propriété privée qui entrave et ralentit les transformations nécessaires du système électrique et de nombreux autres secteurs. Alors que les compagnies d’électricité réalisent des millions de bénéfices chaque année, il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. Nous avons besoin d’une plus grande capacité de planification et de coordination, ce qui n’est pas possible tant que ces entreprises donnent la priorité à la distribution de dividendes. De même, l’utilisation actuelle de l’actionnariat public dans des entreprises comme REE ne change rien à leur comportement commercial. C’est pourquoi nous devons affirmer avec force la nécessaire socialisation de l’ensemble du système électrique. La propriété publique est une condition nécessaire pour prendre en main la transition énergétique et en garantir la planification. Cette propriété publique doit servir de levier pour élargir la participation démocratique des travailleurs et des territoires concernés, et pour promouvoir le reste des transformations sociopolitiques qui réduisent la demande d’énergie.

En bref, le débat public après la panne ne peut se limiter aux causes techniques, il doit aller aux racines politiques et économiques, en soulevant la question d’une transition écosocialiste avec une planification démocratique. Il est évident que les gouvernements capitalistes ne vont pas promouvoir des transformations dans ce sens. Leur objectif est de garantir le profit privé, même au prix de l’investissement de ressources publiques pour y parvenir. Pour modifier cette logique, nous avons besoin d’un mouvement politique de la classe ouvrière qui lutte de manière organisée pour des améliorations ici et maintenant, mais qui vise également la constitution d’un autre type d’État, capable de faire face aux grands défis qui nous attendent en tant que société. Si la classe dirigeante a opté pour le plan de réarmement, les classes populaires doivent opter pour une transition écosocialiste qui réorganise l’utilisation des ressources et propose une autre façon d’être au monde.

Actuellement, cela se concrétise par deux slogans :

- Pour l’expropriation des compagnies d’électricité !

- Planification et propriété publique pour la transition énergétique