Publié le Mercredi 12 mai 2010 à 20h16.

Grèce, après le 5 mai....

Après l’énorme  mobilisation du 5 Mai et malgré le drame des trois victimes dans l’incendie d’une banque, les travailleurs grecs se sont retrouvés à plus de 10 000 le lendemain pour refuser le plan d’austérité. Après un 1er Mai tourné contre le « gouvernement Pasok-FMI-Union européenne », l’enjeu de la grève générale du 5 mai n’était pas tant l’ampleur, attendue, de la grève, mais la force et le caractère des manifestations : les travailleurs allaient-ils rester chez eux, résignés par le harcèlement médiatique sur les mesures inévitables, le discours sur la patrie en danger, mais aussi par le manque de confiance dans des directions syndicales liées au Pasok, avec en prime une division du mouvement ouvrier ? La réponse de la rue a été sans appel : à Athènes, les plus grosses manifs depuis au moins 2001, quand la mobilisation avait fait reculer Simitis (Pasok) sur son projet de casse des retraites. D’immenses cortèges dans Athènes, mais aussi de grosses manifs ailleurs, avec partout un refus catégorique de payer « leur » crise, et en prime des jets d’œufs sur des locaux du Pasok, largement élu contre la droite en septembre et prenant les pires mesures anti­sociales depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. À Athènes, les mobilisations ont montré deux traits importants : l’ampleur de la manifestation a rapproché les différents cortèges, trop souvent séparés ces derniers temps et on a remarqué quelques cortèges en pointe, comme celui d’Olme (enseignants du secondaire) et les syndicats de base qui agissent depuis des semaines pour la mobilisation générale. Et l’exaspération : ainsi, face au Parlement, des milliers de travailleurs ont crié leur rage envers des politiciens qui les méprisent, la droite ou le Pasok, sans oublier l’extrême droite… très fidèle alliée du Pasok avec qui elle a voté les mesures antiouvrières. Et ces manifestants se sont confrontés à visage découvert avec les MAT (CRS) protégeant l’Assemblée. Rien à voir avec l’événement qui a endeuillé cette immense mobilisation : la mort de trois employés de banque, asphyxiés par la fumée de l’incendie provoqué par des cocktails molotov jetés par quelques encagoulés. Sur les responsabilités du très puissant patron de la banque Marfin, sur celles du gouvernement et sur l’exploitation du drame, les communiqués de la Fédération des travailleurs des banques (OTOE) et du regroupement anticapitaliste Antarsya* sont clairs. Mais il faut aussi le dire très nettement : il s’agit d’un crime contre des travailleurs, dont les auteurs ne pouvaient pas ignorer la présence dans les murs. Alors, il ne faut pas laisser la mouvance qualifiée d’autonome étouffer, comme fin 2008, les mouvements de masse. C’est un enjeu crucial qui suppose que la mobilisation construise ses outils de contrôle démocratique, en particulier des comités unitaires contre le plan dit de stabilité. Après cette tragédie, les flics se sont lancés dans une violence incontrôlée, asphyxiant Athènes de leurs armes chimiques et mettant en état de siège le quartier d’Exarcheia, avec entre autres la mise à sac du local du Réseau pour les Droits politiques et sociaux (Diktyo), blessant gravement une militante. Pourtant, malgré cette terreur et malgré le choc des trois victimes, plus de 10 000 travailleurs se sont retrouvés devant le Parlement le lendemain, pour crier non au vote des mesures. C’est dire que la mobilisation est profonde et doit être, sans attendre, renforcée.A. Sartzekis  *Le communiqué d’Antarsya met en cause la responsabilité du patron de la banque Marfin « qui a obligé ses employés à travailler enfermés à clé dans un bâtiment sans protection incendie » et celle du gouvernement « qui a donné des ordres pour une attaque sans merci contre les centaines de milliers de manifestants [...] entravant l’accès des pompiers au bâtiment en feu ».