Alors qu’un nouvel arrêt de travail devait avoir lieu le 22 décembre, les mobilisations ont été particulièrement combatives le 15. La population se révolte contre les exigences du FMI et contre la police qui réprime les manifestants. Désormais c’est chaque jour que l’on a en Grèce au moins une nouvelle raison de se révolter. Rien que cette semaine, les nouvelles exigences du FMI pour verser les prochaines sommes du memorandum : faire fermer les entreprises publiques « boîteuses » selon les critères du profit, faire passer plus de produits de consommation courante dans la catégorie TVA à 23 %, augmenter le temps de travail dans le secteur public, mais y baisser encore les rémunérations… Ou ces chiffres simples, publiés ce dimanche dans Eleftherotypia : des travailleurs évoquent ce qu’ils perdent chaque mois depuis la mise en place des mesures : 200 euros pour un chauffeur de bus, 100 euros pour une infirmière, 1 500 euros (sur 3 000 avant) pour un cafetier... Quant aux pêcheurs égyptiens sur les bateaux grecs, ils gagnent 300 euros par mois… Cette semaine encore, mobilisation de milliers d’habitants de la banlieue de Keratea contre la décision d’installer une décharge à leurs portes, qui plus est sur un site archéologique. Tout ceci pour expliquer la très forte participation à la grève du 15 décembre, et cela dans de très nombreux secteurs. Mais chaque jour, des mobilisations ont lieu, plus ou moins fortes. Toute la semaine, les transports d’Attique (région d’Athènes) étaient en grève contre la casse du secteur, sauf le 15 pour amener le monde aux manifs ! Mardi 14 déjà, un arrêt de travail de trois heures a eu lieu, avec un rassemblement combatif de plusieurs milliers de travailleurs. Et le 15, des dizaines de milliers de travailleurs et de jeunes ont manifesté dans le pays. Pour Athènes, même Pujadas sur France 2 a parlé de manif « monstre » : au moins 50 000 manifestants... mais en deux cortèges, Pame, courant du KKE (PC grec) marchant seul, avec gros cortège, grosse sono, mais sans grosse combativité, et un service d’ordre veillant surtout à tenir éloigné l’autre cortège, celui regroupant les fédérations de GSEE (confédé du privé) et Adedy (fédé du public) et surtout les syndicats de base puis la gauche radicale. Au moins deux fois plus nombreux que celui de Pame, ce cortège était surtout très combatif, avec de forts regroupements (enseignants du secondaire, travailleurs de la santé et des municipalités). Fait nouveau, deux tendances s’affirment. Première tendance : si les travailleurs se servent des appels des directions, leur défiance grandit devant les magouilles, comme celle du dirigeant de GSEE négociant dans leur dos ou celui d’Esia (journalistes d’Athènes) vendant les travailleurs aux gros requins de la presse. On a pu voir ainsi les cortèges partir en manif sans attendre la fin des discours des bureaucrates ! Tendance se traduisant par les tensions dans l’appareil syndical ou politique du Pasok (exclusion d’un député qui a refusé de voter la loi cassant le dr oit du travail). Deuxième tendance : la combativité se traduit par des manifestations résolues, qui ne se réduisent pas aux cocktails molotov ou encore moins aux coups contre un ex-ministre frappé lors de la manif. À Keratea, la population va au contact des MAT (CRS), et le maire et de vieilles personnes ont été violemment frappés. En même temps, face à la violence policière, l’arme de la dérision de masse se répand, comme sous la junte militaire (1967-1973) : « Keratea-Keratades [cocus] 1-0 ! » est très scandé, et le 15 à Athènes, on a vu des flics « voltigeurs » menaçants, ridiculisés par les manifestants qui les applaudissaient. Tendances importantes, à côté de la bataille pour l’unité dans les luttes et l’auto-organisation. La suite devait se produire le 22, avec un nouvel arrêt national de travail. Andrea Sartzekis