Publié le Dimanche 28 septembre 2014 à 10h38.

Grèce. Syriza : demandez le programme...

Le gouvernement Pasok-droite devient fébrile : il vient d’empêcher la diffusion par « sa » télé du discours de Tsipras, dirigeant de Syriza, lors de la foire internationale de Salonique. Censure critiquée au sein même du pouvoir. Cela n’empêche pas les sondages de placer Syriza en tête, et cela alors que des législatives semblent difficiles à éviter du fait que l’actuel Parlement ne pourra pas désigner un nouveau président de la république qui fasse consensus...

Du coup, le discours programmatique de Syriza était très attendu : la crise actuelle, c’est aussi cette situation où face à un gouvernement rejeté, Syriza n’arrive pas à créer une vague de fond basée sur la confiance. La direction a annoncé la couleur : « le programme annoncé n’est pas ce que veut Syriza, mais ce qu’il est possible de faire »... Différentes mesures répondent certes à l’urgence : 250 millions pour nourrir 300 000 familles dans le dénuement ; 543 millions pour augmenter peu à peu les retraites, avec un 13e mois rétabli pour 1,26 million de retraitéEs pauvres ; 54 millions pour un programme de logements à 3 euros le m2, pour les sans abris... Il faudrait recenser en détail ces mesures. Mais ce qui bloque, c’est l’encadrement financier de ces mesures , dont un effet est d’ailleurs de limiter la hausse du SMIC, qui passerait de 586 à 751 euros, loin des besoins minimum !

Rompre ou négocier ?C’est la position sur la dette qui illustre le mieux l’impasse : plus question de dette illégitime ou odieuse, la question de la dette relève désormais de la négociation pour obtenir la suppression d’une grande partie de celle-ci, ce que demandent d’ailleurs bien des économistes bourgeois, et paiement du reste avec une clause de développement. Cela sans oublier une conférence européenne pour définir un new deal, la référence avancée étant celle de l’Allemagne en 1953... Dans le même temps, le groupe économique de Syriza souligne qu’il discute désormais sans problème avec les technocrates européens. Sauf qu’en 1953, le capitalisme a voulu promouvoir l’Allemagne de l’Ouest, et que les crises financières ont depuis pris une autre forme, avec des requins qui comptent sur la dette pour prospérer.Par ailleurs, pour financer des mesures que, pour certaines d’entre elles, nous pourrions soutenir, Tsipras renvoie à la perspective d’impôts sur la richesse, mais surtout s’appuie sur la conviction qu’avec ces mesures, la croissance va repartir et donc pourra financer ces mesures...On a récemment lu dans le journal le Monde que la présidente de la région d’Athènes, membre de Syriza, tenait un discours pragmatique « assez éloigné des envolées anti-memorandums du chef de file de Syriza ». En fait, Rena Dourou est tout à fait sur la même longueur d’onde que Tsipras, dont le discours de Salonique reflète la tendance dominante : ne pas s’appuyer sur les luttes (il y a un an et demi, Syriza avait déjà trahi la grève socialement explosive des enseignantEs), mais rechercher une image de responsable pouvant gérer les institutions. À ce titre, la visite chez le pape qui a eu lieu cette semaine n’est pas anecdotique, mais le signe d’un alignement au sein des institutions bourgeoises. Cela avec l’accord de toutes les sensibilités... Seul un économiste de Syriza, Lapavitsas, a noté que Tsipras a voulu, à Salonique, concilier l’inconciliable, le chef de file de la gauche de Syriza, Lafazanis, applaudissant lui les propos de Tsipras !Il y a urgence de renforcer la gauche anticapitaliste en dehors de Syriza.

D’Athènes, A. Sartzekis