Publié le Lundi 24 mai 2021 à 17h19.

Guyane : conflit entre l’État colonial et les élus locaux sur la fermeture des écoles

La gestion coloniale de la crise sanitaire se poursuit en Guyane. Comme on l’avait indiqué dans notre dernier article, la réouverture des écoles a été de mise alors que le variant brésilien est présent chez 80% des personnes testées, alors qu’elle se fait sans distanciation, sans demi-jauge, avec des écoles surchargées, etc. Le Préfet, dans une pure attitude coloniale, veut imposer l’ouverture coûte que coûte.

Après trois semaines d’ouverture, le résultat ne s’est pas fait attendre, on a doublé le taux de contamination pour dépasser les 400 cas pour 100 000 habitants sur l’île de Cayenne. Le virus est maintenant répandu sur l’ensemble du territoire.

Le recteur ne veut rien entendre

Comme c’était prévisible, tout le monde a alors tiré la sonnette d’alarme pour un nouveau confinement. Mercredi 12 mai, il y a eu une discussion avec les élus locaux, les représentants de l’État sur comment organiser un confinement de deux semaines. Des élus locaux se sont insurgés, donnant leur accord pour un confinement mais exigeant la fermeture des écoles. Le recteur a refusé catégoriquement, suivant la position que le ministre Blanquer. Cela donc sans demi-jauge, pas de protocole sanitaire adapté, sans distanciel.

Sur le dernier weekend des 8 et 9 mai, sur 300 cas recensés, 95 sont issus de milieux scolaires. Donc les écoles sont vraiment la source de contamination, comme Jean Casteix a d’ailleurs dû le reconnaître à la télévision. Les clusters continuent de se développer dans l’éducation : des écoles, des collèges et lycées et même des écoles maternelles sont fermés intégralement, il n’y a pas un seul établissement scolaire sans classe fermée. Le virus est donc partout dans les écoles mais on va continuer pendant 15 jours avec un pseudo confirment où il faut une attestation pour sortir mais où on va continuer à l’école et au boulot normalement.

Les difficultés d’une riposte à la gestion coloniale de la crise

80% des clusters sont en milieu scolaire ou professionnel, on n’a quasiment pas identifié de cluster lié à la vie sociale ou individuelle des Guyanais mais c’est celle-ci qu’on réprime avec un couvre-feu qui ne s’est jamais arrêté depuis le 16 mars 2020. C’est l’état d’urgence permanent depuis ce moment, en dépits de toute législation. Le préfet prétend concerter mais en réalité c’est lui qui décide de tout.

Sur le plan de la riposte, les difficultés sont importantes. La campagne des territoriales est en cours donc ça ne favorise pas la convergence des luttes. On a notamment le collectif unitaire Mayouri santé Guyane qui a du mal à fonctionner. Il a en son sein des partisans de différentes listes qui s’opposent et cela ne favorise pas l’action commune. En plus de ça, on fait face à une grosse diffusion des discours complotistes qui influencent énormément une partie de la sphère militante guyanaise et ne favorise absolument pas un combat d’ensemble.

Au niveau des écoles, les enseignants sont dans l’ambivalence, s’interrogent sur comment s’occuper des élèves si les écoles sont fermées. Donc ça ne bouge pas beaucoup. En revanche, es élèves eux-mêmes ont montré depuis quelques semaines qu’ils ne veulent pas continuer à s’exposer et à propager le virus. Un jeune de 19 ans est en réanimation à Cayenne, ce qui a refroidit pas mal de jeune. Des blocages ont eu lieu dans plusieurs établissements la semaine dernière.

Tentative de coup de force du préfet

Le 17 mai justement, les élus ont décidé de fermer les écoles à partir de jeudi 20, malgré la décision du représentant de l’État de les maintenir ouvertes. Cette décision a été prise à l’unanimité des maires et du président de la Collectivité territoriale de Guyane. Cette décision, en partie liée à la campagne électorale qui pousse les élus à faire semblant de s’affronter à l’État a conduit à une réaction démesurée du préfet Thierry Queffelec. Celui-ci a envoyé un courrier au président du CTG pour lui dire que l’État c’est lui, que les élus n’ont rien à décider et demande coûte que coûte de maintenir les établissements ouverts.

Il reprend une attitude de gouverneur : ce serait à lui de tout décider, les élus ne sont rien, même dans une décision contraire à toute logique pour éviter contamination et des morts.