Alors que Berlusconi échappait à trois voix près à une motion de défiance qui l’aurait obligé à démissionner, la jeunesse italienne est descendue massivement dans la rue pour s’opposer à la réforme de l’université. Comme en France, le gouvernement réagit en criminalisant le mouvement. Il est urgent de se coordonner au niveau européen pour contrer ces attaques contre l’ensemble des populations. Comme leurs homologues anglais, il y a deux semaines, les étudiants italiens se sont mobilisés massivement au cours des derniers jours pour protester contre la réforme des universités et l’augmentation des frais d’inscription. Mardi 13 décembre, d’énormes manifestations et des actions de blocages se sont déroulées dans tout le pays.
À Palerme, lycéens étudiants et salariés ont bloqué l’accès à l’aéroport, à Milan les manifestants ont occupé la Bourse des valeurs, mais c’est à Rome que s’est tenue la plus grande manifestation qui a réuni plus de 100 000 personnes. Outre les étudiants, on retrouvait coude à coude des salariés qui protestaient contre la disparition des indemnités de chômage technique, des habitants de la région de Naples s’opposant à la construction d’une déchetterie hyper polluante dans leur commune, ou des victimes du tremblement de terre de l’Aquila, non relogés et non indemnisés. Autant dire, un concentré des contradictions sociales de l’Italie de Berlusconi.
C’est d’ailleurs contre le « caïman » et sa clique maffieuse qu’étaient dirigées les plus vives attaques des manifestants. Ainsi pouvait-on lire : « Dehors la dictature » sur quelques banderoles. Le jour même de la mobilisation, échappant par trois voix à une motion de censure qui l’aurait conduit vers la porte, le président du Conseil était immédiatement soupçonné d’avoir acheté les votes de plusieurs parlementaires, dont certains classés à gauche ; une bagarre éclatant même au sein du Parlement.
Ces affaires qui n’en finissent pas, lassent la plupart des Italiens qui ont perdu toute confiance envers le personnel politique. Cette colère populaire, profonde, amenait les manifestants à rentrer dans la zone rouge (le centre historique) établie sur le même mode que le dispositif mis en place à Gêne, lors du sinistre G8 de 2001. Des véhicules blindés de la police ont été incendiés. La presse italienne, dont les principaux titres appartiennent à Berlusconi, parle bien sûr de provocations, d’éléments incontrôlés, de membres des black blocs venus semer la terreur. Mais, comme le disent nos camarades de Sinistra Critica (gauche critique) : « Avec quelle légitimité la politique institutionnelle, qui affronte la crise économique en répondant seulement aux demandes des banques et des entreprises, peut-elle se permettre de juger et de se scandaliser de ce qui s’est passé ? » Aujourd’hui, le gouvernement entend casser le mouvement en le criminalisant. Des dizaines de jeunes ont été arrêtés, après les affrontements avec la police et certains sont inculpés. Il compte également sur la démobilisation pendant les fêtes pour que tout rentre dans l’ordre, que cessent les occupations et que soit votée la loi université. Pourtant de nouvelles dates de manifestations sont envisagées par le mouvement en pleine phase de construction. Dans de nombreuses villes, des collectifs « Unis contre la crise » se forment et les centres sociaux multiplient les initiatives de mobilisation. Après la Grèce, l’Irlande, le Portugal, l’Angleterre, la mobilisation en Italie montre que la jeunesse affronte partout les mêmes problèmes liés aux politiques d’austérité imposées par les capitalistes pour nous faire payer leur crise. Nous devons redoubler d’efforts pour coordonner toutes ces luttes et leur donner un caractère européen. Le NPA, à l’initiative avec le SWP d’une conférence internationale à laquelle ont participé 27 organisations venus de 20 pays européens, était un jalon, il est urgent d’avancer au plus vite dans cette voie. Alain Pojolat