La ministre des Armées française Florence Parly se réjouit du succès de l’opération Barkhane qui a éliminé, le 3 juin, le chef historique d’Al-Qaeda au Maghreb islamique (Aqmi) Abdelmalek Droukdal et plusieurs de ses complices. Mais cela ne change rien à la situation de crise dans laquelle le Mali s’enfonce.De nouveau, les FAMA (Forces armées maliennes) viennent d’être accusées par l’association peule Tabital Pulaaku d’un nouveau massacre dans un village du centre du Mali où même les enfants n’ont pas été épargnés.
Crimes de guerre
Ces violences contre les civilEs deviennent de plus en plus fréquentes et l’armée malienne n’est pas la seule à se rendre coupable de ces exactions, puisque les militaires du Niger ou du Burkina Faso sont aussi pointés du doigt.
Amnesty International vient de sortir un rapport détaillé sur ces violations des droits humains en donnant une explication sur la recrudescence de ces crimes, par la pression que subissent les hiérarchies militaires pour obtenir des résultats.
En effet, on se souvient que, lors du sommet de Pau du 13 janvier 2020 qui rassemblait les principaux chefs d’État des pays sahéliens, Macron exigeait de ses pairs des progrès tangibles contre les organisations djihadistes. Résultat, à défaut de porter des coups sévères contre les terroristes, les armées sahéliennes accumulent les cadavres de civils.
De nombreux témoignages font état d’opérations des forces armées parfois accompagnées de milices progouvernementales dans les villages avec des exécutions sommaires, des enlèvements et des tortures. Ces pratiques commencent à devenir monnaie courante, surtout contre certaines communautés soupçonnées de soutenir les djihadistes.
Ces opérations se déroulent dans le cadre du G5 Sahel, une structure encadrée et soutenue par l’armée française, qui ferme les yeux sur l’impunité dont bénéficient les auteurs de ces crimes de guerre.
Conflits multiformes
La violence devient endémique au Mali, entre les communautés pastorales et agricoles autour des terres et des points d’eau. L’absence de l’État favorise les vols de troupeaux et la circulation d’armes de guerre provoque une augmentation des décès.
Les civils sont aussi pris en étau dans les affrontements violents que se mènent désormais les deux factions djihadistes rivales, le « Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans » d’Al-Qaeda et « État islamique dans le Grand Sahara » pour avoir le leadership sur la région.
Quant au gouvernement, il a choisi la manière forte, notamment contre les activistes de la société civile. Ainsi Clément Dembélé, le président de la Plateforme contre la corruption et le chômage, a été enlevé par les forces de sécurité pour avoir mené des enquêtes sur la corruption des hauts fonctionnaires dans la capitale à Bamako. Relâché, il reste cependant sous le coup d’une accusation de fomenter un coup d’État.
La crise est aussi politique, l’ancien allié du président malien Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), l’imam Mahmoud Dicko, cristallise l’ensemble de l’opposition et organise manifestations et rassemblements pour exiger la démission d’IBK. Le pouvoir de déstabilisation de cet imam rigoriste est tel que chancelleries occidentales et responsables de la force de l’ONU, la MINUSMA, tentent une médiation entre les deux hommes pour apaiser le climat politique. L’avenir du Mali reste incertain.