Publié le Jeudi 10 juillet 2025 à 11h00.

Le plan de purification ethnique de la « Fondation humanitaire de Gaza »

Tandis que Netanyahou rencontre Trump à Washington pour parler « paix », les révélations sur le plan de déplacement massif de population à Gaza mettent en lumière les objectifs du régime. Notre mobilisation contre l’impunité et les livraisons d’armes doit se poursuivre.

 

À l’heure où nous écrivons, Netanyahou est en route pour Washington, où Trump doit le recevoir afin de « finaliser » un plan de « cessez-le-feu » et de « paix », selon les termes du président américain. Pour se rendre aux États-Unis, l’avion doit survoler l’Europe. Mais il n’a traversé qu’un seul pays : la France — qui lui en a donné l’autorisation en violation flagrante de ses obligations envers le Tribunal pénal international. Ce dernier a en effet délivré des mandats d’arrêt contre le Premier ministre israélien, contraignant juridiquement la France à l’arrêter et à le livrer à la justice. Il n’en sera évidemment rien. Ce n’est pas la première fois que Netanyahou survole l’espace aérien français en toute impunité depuis l’émission de ces mandats en novembre dernier.

Un cessez-le-feu incertain

« Le Hamas ne sera plus là » : Netanyahou a, pour la énième fois, posé cette exigence comme condition au cessez-le-feu. C’est le principal point d’achoppement des négociations depuis des mois : le Hamas exige la fin complète du conflit en échange de la libération de toustes les détenuEs, tandis qu’Israël refuse de cesser ses attaques tant que le mouvement n’est pas ­entièrement démantelé. Le rapport de forces au sein de la classe dirigeante israélienne reste opaque, ce qui rend difficile d’évaluer les chances qu’un accord soit effectif. Toutes les tentatives récentes pour instaurer une nouvelle trêve ont échoué, Israël refusant un ­cessez-le-feu durable.

Le plan GHF

Mais les dirigeants israéliens semblent avoir d’autres plans. Le 7 juillet, l’agence Reuters a révélé les détails d’un projet de nettoyage ethnique élaboré depuis février par la GHF (la « Fondation humanitaire de Gaza »), l’association prétendument « caritative » chargée ­d’organiser la ­distribution de l’aide. Utilisée pour évincer l’UNRWA (l’agence de l’ONU pour les réfugiéEs palestinienNES), cette organisation a surtout transformé les zones de distribution en champs de tir à l’aveugle. Sous les bombardements incessants, à Gaza le bilan atteint désormais une centaine de morts par jour.

Selon les documents obtenus par Reuters, le plan prévoit la création d’une zone de regroupement au sud du couloir de Morag, incluant Rafah — ou plutôt ce qu’il en reste — afin d’y entasser 600 000 personnes. L’objectif affiché : remplacer l’influence du Hamas sur la population en proposant un lieu de résidence « temporaire et volontaire » pour « se déradicaliser, se réintégrer et se préparer à un futur ­déplacement ».

Doté d’un budget de deux millions de dollars, ce projet s’inscrit dans la continuité de la vision de Trump pour Gaza, reposant sur des déplacements forcés vers la Jordanie et l’Égypte. Le GHF a formellement démenti ces informations, mais on imagine mal qu’un tel plan ait été conçu pour rien. Il correspond en tout point au rêve israélien de purification ethnique, masqué derrière le prétexte de la lutte contre le Hamas. Prétendre « déradicaliser » une population que l’on massacre, que l’on affame et dont on détruit les infrastructures revient à exiger qu’elle disparaisse. Car il ne devrait être difficile pour personne de comprendre que les GazaouiEs sont aujourd’hui radicalement opposéEs à l’occupation.

Édouard Soulier