Ces derniers mois, de nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer le mandat d’arrêt européen (MAE). Un Manifeste contre le MAE et les juridictions d’exception en Europe, pour la liberté d’Aurore Martin, est aujourd’hui signé, au niveau du Pays basque comme au niveau hexagonal, par de nombreuses personnalités : les écrivains Stéphane Hessel et Albert Jacquard, les historiens Maurice Rajsfus et Benjamin Stora, Michel Tubiana de la LDH, Patrick Baudoin de la FIDH, Pascale Maelman du Syndicat des avocats de France, Thomas Coutrot d’Attac, pour n’en citer que quelques-uns ; des représentantEs ou membres de nombreuses organisations politiques, syndicales, associatives ; des éluEs (80 d’entre eux avaient rendu public un texte où ils se déclaraient prêts à accueillir chez eux Aurore Martin). Une large unité se réalise pour défendre les libertés démocratiques.
Le collectif du Pays basque contre le mandat d’arrêt européen organise le 18 juin à la Halle d’Iraty à Biarritz une journée de débat et de mobilisation, à laquelle appellent les signataires du Manifeste. Une première table ronde aura lieu le matin à 10 heures sur la question du MAE et des lois d’exception, une seconde se tiendra l’après-midi à 16 heures sur la résolution du conflit politique basque. La journée se clôturera par un meeting à 19 heures, une fête populaire et un concert le soir.
Le mandat d’arrêt européen (MAE) continue de frapper les militantEs basques. Aurore Martin, de nationalité française, membre de l’organisation indépendandiste Batasuna, reste cachée pour échapper à la police. Elle risque douze ans de prison si elle est livrée à Madrid, simplement pour s’être exprimée sur son engagement politique, publiquement, dans l’État espagnol où Batasuna (légale en France) est interdite. Les huit jeunes de Segi (organisation de jeunes indépendandistes) de nationalité espagnole qui s’étaient réfugiés en France sont aujourd’hui en prison en Espagne, ayant été remis à Madrid après des arrestations où la police française s’est distinguée par son comportement particulièrement violent.
Le MAE repose sur « un degré de confiance élevé entre les États européens ». Cela permet à la France de remettre Aurore Martin à l’État demandeur, l’Espagne, où sévissent juridictions d’exception et torture ; il a suffi pour cela que l’État espagnol qualifie de criminelles les oppositions qu’il se refuse à reconnaître, comme Batasuna. La question de fond est politique. La racine du conflit réside en effet dans le fait que l’État espagnol nie obstinément le droit à l’autodétermination pour le peuple basque.
On imagine facilement l’extension de l’application du MAE à des militantEs politiques, syndicaux ou associatifs de l’espace européen… Dans cette période de crise du capitalisme, de luttes et de résistances sociales, le MAE est de fait un outil qui permet de museler les oppositions politiques. Il n’est pas « détourné » lorsqu’il sert, comme actuellement au Pays basque, à réprimer des opposants à l’État espagnol. C’est pourquoi il ne peut être révisé pour en faire un MAE « acceptable ». Conçu pour la répression politique, il doit être clairement supprimé. L’enjeu est de construire un mouvement large pour exiger et obtenir son abrogation pure et simple.
Claude Larrieu