Publié le Mercredi 6 juin 2012 à 22h29.

Municipales en Italie. Le discrédit des partis

Deux semaines après le second tour des élections municipales, le cadre politique italien se montre toujours plus bouleversé et une crise des partis traditionnels apparaît.

En effet, les résultats ont montré, dans plusieurs villes importantes (dont les plus grandes sont Gênes et Palerme), un écroulement des partis de la droite, sans que le centre gauche, et notamment le Parti démocratique, ne puisse vraiment en profiter. La vraie nouveauté a été le super score obtenu par les listes du Mouvement 5 étoiles, promues par le comédien Beppe Grillo, qui ont remporté la mairie de Parme et dépassé les 15 % dans plusieurs villes, dont Gênes.

Plus dans le détail, le PDL (parti de Berlusconi) a perdu énormément de voix partout, s’écroulant souvent en dessous de 20 %, à tel point que plusieurs candidats ne se sont même pas qualifiés pour le second tour. La Ligue du Nord, dans la foulé des scandales judiciaires de Bossi et des luttes internes qui la déchirent, a perdu la quasi-totalité des mairies qu’elle dirigeait seule depuis bien des années (ayant maintenu seulement le maire de Vérone).

Cependant, si le Parti démocratique remporte plusieurs mairies grâce à la débâcle de la droite, il ne gagne pas de voix sur le thème de la crise. Les voix perdues par les forces de droite sont allées massivement vers l’abstention, le mouvement de contestation des partis créé par Grillo, ou vers d’autres formes de voix protestataires. Dans ce contexte, la gauche radicale (Sel de Vendola et le PRC) n’a pas réussi non plus à percer, et n’est donc pas considérée comme une réponse au discrédit des partis majoritaires et au mécontentement social grandissant.

Le grand gagnant de cette élection, le Mouvement 5 étoiles, est une « drôle de bête » qu’il convient donc de connaître et d’analyser à fond. En effet, il s’agit là d’un phénomène complexe qui lie la crise des partis traditionnels – incapables de répondre aux besoins de « la société civile » et préoccupés seulement de garder leurs propres privilèges, corrompus et pourris – aux capacités communicatives du comédien Beppe Grillo, aimé par le grand public, et qui a su donner visibilité et unité à un mouvement plus souterrain de collectifs locaux nés sur des thèmes classiques de la gauche : la défense de l’environnement, la légalité contre la corruption de l’État, la lutte contre le pouvoir de l’économie et des finances, etc. Cependant, Grillo use d’un ton très populiste et ses dénonciations sont très éloignées d’une vision de classe. Il s’agit donc de faire la différence entre les gens qui vont massivement voter pour la seule nouveauté antisystème qui semble crédible, et le petit groupe qui gère la machine autour du gourou Grillo, dans la plus totale absence de démocratie et de transparence. Le Mouvement de Grillo est souvent tenté de reprendre de thèmes de droite pour récupérer les voix, comme l’opposition aux droits des immigrés, et des propos sexistes et homophobes sont souvent entendus dans les meetings.

Ce résultat électoral est donc la combinaison des crises économique et politique italiennes, en l’absence d’une réponse de classe et de mobilisations sociales. Le renouvellement des discours et la création de nouvelles formes de participation sociale peuvent déboucher tantôt sur une recherche des moyens de s’en sortir, tantôt sur une attirance pour tout discours populiste.

Flavia d’Angeli