Donald Trump a été investi, sans surprise, à Cleveland, le 21 juillet, lors de la Convention nationale des Républicains, le grand cirque du Grand Old Party (GOP) qui s’est tenu la semaine précédant celle des Démocrates.
Il a réussi son OPA sur un parti ébranlé qu’il est loin d’avoir rassemblé. L’establishment du parti a boycotté la Convention, et Ted Cruz, le rival éconduit, a pris sa revanche sur celui qui l’avait surnommé « Ted le Menteur » en refusant de lui apporter son soutien.
Le milliardaire « champion du peuple »
L’affaire avait mal commencé avec le scandale du plagiat par Melania Trump d’un discours de Michelle Obama, plagiat qui soulignait surtout les convergences de « valeurs » dans ce milieu des sommets du monde politique et de la bourgeoisie où se mélangent la morale protestante, le Far West et le messianisme évangéliste…
Le milliardaire, aujourd’hui en 324e position dans le classement Forbes des plus grandes fortunes, entouré de trois amis qui viennent respectivement en 262e, 638e, 722e position, et de sa dévouée famille, a vite repris les choses en main : « Je suis votre voix »... s’adressant à « ceux qui travaillent dur alors que plus personne ne parle en leur nom », victimes d’un « système truqué » dont bénéficient uniquement « les élites »...
Le démagogue a joué des peurs contre les 180 000 migrants dits illégaux qui « vont et viennent librement ce soir pour menacer les citoyens paisibles. […] Le crime et la violence qui affectent aujourd’hui notre nation vont bientôt prendre fin. » Il est « le candidat de la loi et de l’ordre », celui du « droit à l’autodéfense donné par Dieu »…
« Make America great again » a été son leitmotiv contre l’Europe, l’OTAN, l’OMC, « l’héritage d’Hillary Clinton : mort, destruction, terrorisme et faiblesse ». Il oublie au passage Bush et la responsabilité des Républicains… Le tout s’accompagne d’une offensive contre les droits démocratiques, contre l’avortement ou le mariage pour tous, d’attaques racistes contre les musulmans… À travers ce méli-mélo réactionnaire, une constante fédère autour de lui, l’hostilité : la haine pour Obama qui se concentre sur Clinton. « Hillary for Prison » était le T-shirt quasi officiel de la Convention !
Clinton, entre Wall Street et Sanders
Dans la foulée, le lundi 25 juillet, s’est ouverte à Philadelphie la Convention des Démocrates... avec le scandale des milliers de mails internes au parti soulignant la partialité de l’establishment contre Sanders. Pas vraiment un scoop ! Mauvais coup de Poutine en soutien à Trump ? Qu’importe, « Bernie » a apporté son soutien à Hillary, « Trump est une brute et un démagogue ». Un soutien désapprouvé, voire conspué par une large fraction de ses partisans lors de la première journée de la Convention toute entière vouée à l’éloge de Clinton, vantant son amour du peuple.
Généreuse et progressiste, première femme candidate à la présidence, certes, mais surtout la candidate de Wall Street, de l’establishment, affichant son expérience du pouvoir comme celle de son colistier, le sénateur de Virginie Tim Kaine. « Je suis ennuyeux », dit-il de lui-même. Il est surtout destiné à rassurer l’électorat hésitant entre Trump et Clinton. Il se dit notamment clairement opposé à l’IVG...
Clinton parie sur le « tout sauf Trump » pour avoir les voix sur sa gauche, sauf que pour bien des jeunes, des travailleurs qui se sont reconnus en Sanders, « le moindre mal »... reste un mal inacceptable.
Quelle que soit l’issue des numéros à venir du cirque électoral, la réponse à la montée des préjugés réactionnaires et racistes, à l’offensive contre les droits sociaux ou au militarisme guerrier, ne pourra venir que de l’intervention directe des travailleurs et des classes populaires, des Noirs et de la jeunesse. Une « révolution politique » ? Bien plus, une révolution politique et sociale pour enlever aux milliardaires leur mainmise sur la société.
Yvan Lemaitre