« Le changement de politique envers Cuba marque un avant et un après dans l’hémisphère. […] Le fait que le président Castro et moi soyons assis ici aujourd’hui représente un événement historique »...
Voilà les mots d’Obama dans son discours devant une trentaine de chefs d’État au cours du septième Sommet des Amériques. Un changement dans la continuité pour garder la main sur l’Amérique du Sud que les USA considèrent toujours comme leur arrière-cour.
La politique de la poignée de main...La poignée de main « historique » entre Obama et Raoul Castro a fait la une. Cuba était invité pour la première fois, et Obama a dû s’en accommoder... mais pas seulement. Il a pu mettre en scène sa politique annoncée le 17 décembre dernier visant à rétablir des relations avec Cuba. La dernière rencontre datait d’avril 1959, deux mois après la révolution, quand Richard Nixon, alors vice-président, avait rencontré Fidel Castro, alors Premier ministre. Les relations diplomatiques avaient été rompues en janvier 1961.Barack Obama a estimé qu’« avec le temps, il est possible pour nous de tourner la page ». « Cela a été une histoire compliquée, celle de nos pays, mais nous sommes disposés à avancer », a répondu Castro après avoir fait un plaidoyer contre la politique impérialiste des USA... pour, au final, saluer Obama, un « homme honnête ». Il veut obtenir le retrait de Cuba de la liste des pays soutenant le terrorisme, premier pas pour la réouverture d’ambassades dans les deux pays et la levée de l’embargo imposé depuis 1962.
… et celle du coup de poing« L’arrivée de Cuba est le résultat de l’union et de l’intégration dans la région, et non une concession des États-Unis », a précisé le président vénézuélien Maduro. Il voulait souligner l’indépendance des pays d’Amérique latine de l’empire américain alors qu’Obama a fait passer un décret désignant le Venezuela comme une « menace inhabituelle et extraordinaire » pour la sécurité des États-Unis.En réalité, leur politique vise à plier le régime en l’intégrant dans sa politique sud-américaine et le marché au moment où le peuple cubain n’a plus la force de continuer à résister et où les différents gouvernements de gauche ou de centre gauche, progressistes ou d’orientation national-populaire, sont en difficulté.Maduro a battu le rappel de la solidarité contre l’« agression impérialiste » mais le jeu entre le Venezuela et les USA est plus compliqué. Obama a assuré que « le Venezuela n’est pas une menace pour les États-Unis, pas plus que les États-Unis ne constituent une menace pour le Venezuela », et dans le même temps, Maduro s’est dit « prêt » à inaugurer une « nouvelle ère » des relations avec les États-Unis : « Je respecte Obama, mais je ne lui fais pas confiance. »... Derrière les jeux de rôles diplomatiques se dessinent des rapports de forces.
Ni prospérité ni équité« Prospérité avec équité : le défi de coopération dans les Amériques », tel était donc l’intitulé de ce sommet, qui s’est conclu sans déclaration finale, les États-Unis refusant d’y voir mentionné un soutien à Caracas contre lui. Une simple mise en scène diplomatique se jouant des peuples, alors que l’offensive américaine est, elle, bien concrète. Les USA multiplient les bases militaires dans la région, en ouvrant de nouvelles en Colombie, et sur le plan économique, les réseaux de capitaux des multinationales nord-américaines ou européennes captent toujours davantage de ressources naturelles, de terres et de main-d’œuvre.Les manœuvres diplomatiques accompagnent les pressions militaires et économiques, financières pour renforcer la mainmise des USA sur le continent latino-américain qui concentre plus de 600 millions d’habitants. Les travailleurs et les peuples n’ont pas dit leur dernier mot : une nouvelle révolution est à l’ordre du jour pour libérer les Amériques de la domination du capital...
Yvan Lemaitre