Dimanche 14 avril, Nicolas Maduro a été élu président de la République bolivarienne du Venezuela avec un peu moins de 51 % des suffrages et, seulement 230 000 voix d’avance sur son opposant de droite Henrique Capriles. Il succède ainsi à Hugo Chávez, qui l’avait désigné comme son remplaçant, à quelques semaines de son décès. Il s’agit ainsi de la 17e victoire électorale (sur 18) du chavisme en 14 ans de processus bolivarien.Cependant, entre l’élection du 7 octobre 2012 où Chávez avait gagné avec plus de 11 points d’écart et celle du 14 avril 2013, le camp présidentiel a perdu près de 700 000 voix alors que l’opposition en a gagné à peu près autant. Et l’abstention progresse de deux points.
Comprendre les difficultésPlusieurs raisons à ce tassement. D'abord la campagne elle-même, où l’opposition a utilisé la disparition de Chávez et les conditions de sa succession pour délégitimer Maduro. Présenté comme usurpateur, elle a martelé ne pas reconnaître sa désignation. Dès la victoire de son concurrent connue, Capriles a refusé de s’engager à respecter les résultats des élections, largement aidé par l’ensemble des médias internationaux et les principales chaînes de télévision et de journaux du pays. La deuxième raison est la personnalisation de la campagne. Maduro n’est pas Chávez. Si le président défunt gagnait haut la main les élections, c’était certes sur son bilan, mais aussi grâce à son charisme populaire. Il est un ancien syndicaliste du métrobus de Caracas et un ex-militant de la Liga Socialista (une organisation légale liée au mouvement de guérilla Frente Guerrillero Antonio José de Sucre, qui a intégré le PSUV, le parti de Chávez, à sa création en 2007), mais le nouveau président est avant tout celui qui était dans l’ombre de Chávez.Enfin, il y a la résurgence des nombreuses questions sociales, politiques et économiques non résolues. Dès les élections d’octobre 2012, de nombreuses voix se sont élevées pour expliquer que l’urgence était d’accélérer le processus en cours en relançant les réformes sociales, mais aussi en prenant à bras le corps la question du changement radical de modèle économique. Or, cela implique de s’affronter directement à tous ceux qui se sont enrichis au cours de la dernière décennie par leur fonction au sein de l’État et du parti.Ce n’est donc pas un hasard si quelques jours avant les élections s’est constitué un bloc de gauche intitulé « Plateforme Patrie Socialiste » regroupant intellectuels, syndicalistes, organisations sociales, dans le but de tirer la campagne électorale du chavisme vers la gauche. Ils revendiquent la consolidation des mouvements sociaux et leur autonomie vis-à-vis du pouvoir, en s’appuyant sur le programme électoral de Chávez de 2012.
Et maintenant ?Aidé par les pays impérialistes, Capriles est décidé à radicaliser l’opposition contre la légitimité de la victoire de Maduro. Le seul moyen de contrer cette politique est de s’adresser à la majorité sociale du pays qui a besoin de l’élargissement des conquêtes sociales, d’une amélioration des services publics, d’un approfondissement de la démocratie politique mais aussi des formes de pouvoir populaire dans les villes, les entreprises et à l’intérieur du pays. L’approfondissement de la participation populaire au processus signifierait un transfert immédiat de pouvoir réel vers les conseils communaux, en leur donnant les moyens de décider. La mise en œuvre d’une politique économique anticapitaliste passerait alors par des mesures immédiates comme socialiser les banques dans un grand pôle public, organiser un audit sur la question de la dette externe, imposer le contrôle ouvrier dans toutes les entreprises, etc. Enfin, il est indispensable de définir enfin le « Nouveau Modèle Productif » dont parle le gouvernement. Pour y parvenir, le combat contre la bureaucratie et la bourgeoisie, qu’elles soient « classique » ou « bolivarienne », devient central. Au sein du PSUV, mais aussi à l’extérieur, des milliers de militants et participants aux luttes et aux mouvements sociaux sont disponibles. L’enjeu des mois à venir sera de les regrouper de manière autonome.Dans un tel processus ouvert de changement social, le NPA ne peut rester indifférent. Nous nous opposons à tous ceux qui veulent revenir en arrière et détruire les conquêtes arrachées depuis 1999. En France, cela signifie notamment combattre la désinformation organisée par les médias et toutes les velléités des pays impérialistes pour imposer un retour en arrière.
Patrick Guillaudat et Franck Gaudichaud