Ces dernières semaines ont vu s’exprimer des contestations non seulement de la gestion de la crise sanitaire chaotique par le pouvoir, mais plus globalement de 30 ans d’une politique libérale de casse dont le gouvernement Macron est à la fois le produit et le point d’orgue.
Ce gouvernement « ni de droite ni de gauche » ne se réclame d’aucune des traditions des courants politiques qui ont structuré la vie politique française depuis 1958 mais, par contre, réunit les défenseurs des politiques libérales les plus zélés et aussi les plus impatients et émoustillés par les frissons du pouvoir et les « ors de la république », au point de rompre avec leur famille politique d’origine. Ce qui donne un attelage bien testostéroné (Dupond-Moretti, Darmanin, Blanquer, Le Maire, Attal) qui, par le fond de sa politique mais aussi son arrogance et son mépris, cristallise le rejet de sa politique, provoquant une montée des contestations politiques et sociales en pleine période électorale.
Des contestations de fond du libéralisme
Depuis fin novembre, on a vu se succéder, voire se juxtaposer, la contestation de secteurs majeurs de services publics et de salariéEs en lutte pour défendre leurs emplois contre des plans de licenciements que le gouvernement et son ministre Le Maire accompagnent, rejetant toutes les propositions portées par les salariéEs comme à la SAM de Decazeville ou avec les ex GM et S de La Souterraine…
« Nous ne voulons plus d’une justice qui n’écoute pas et qui chronomètre tout » : C’était le titre d’une tribune qui a réuni fin novembre 5 476 magistrats (sur 9 000) et 1 583 fonctionnaires de greffe, détaillant, chiffres à l’appui, l’état calamiteux de l’institution judiciaire et ses besoins pour rendre « une justice digne ». Cette tribune est devenue le moteur d’une mobilisation massive le 15 décembre, appelée par 17 organisations du monde judiciaire.
« C’est grâce au seul investissement des personnels que nos établissements tiennent bon ! Mais jusqu’à quand ? Les salariéEs sont épuiséEs après deux ans de sacrifices constants (…) Ça suffit ! Il est temps de régler les problèmes de fond qui traversent notre système de santé et d’action sociale. » C’était l’appel à la mobilisation du 11 janvier par les organisations syndicales et les associations, collectifs de défense de la santé.
La preuve par l’Éducation nationale
La mobilisation dans l’Éducation nationale autour du 13 janvier a atteint des chiffres qu’elle n’avait pas atteint depuis longtemps dans ce service public. La désorganisation des protocoles inadaptés et se succédant en rafale a été le couronnement des 55 mois de Blanquer, ce ministre autoritaire, adepte des vacances à Ibiza, et de son entreprise de démolition systémique de l’Éducation nationale. Elle a rappelé que la mobilisation du monde de l’éducation (enseignantEs mais aussi personnels de la vie scolaire et médico-sociaux, AESH…) a un vrai pouvoir de désorganisation. En tout cas Castex et Véran ont bien compris le message, qui ont encadré Blanquer le soir même pour jouer les pompiers avec les organisations syndicales.
Il faut dire que Blanquer ne s’était pas privé de jouer les pyromanes « On ne fait pas grève contre un virus » pour tenter de ridiculiser l’appel à la grève. Les tentatives d’intimidation ministérielle sont restées sans effet, car les secteurs mobilisés ont la conviction de leur légitimité reconnue par l’opinion, à commencer par les parents, usagerEs du système hospitalier et de la justice, conscients du saccage.
Construire une perspective anticapitaliste
À cette étape on peut dire que ces analyses infusent dans les consciences, que la colère couve, et commence à contrecarrer le poids de la résignation et du fatalisme. Car dans ces 20, voire 30 ans de politiques libérales, il y a également le bilan de gouvernements de gauche. De cette gauche qui a démoralisé, déboussolé les convictions, combattu les aspirations au socialisme dont elle portait encore le nom, y compris en jetant les bases des méthodes répressives et autoritaires déployées ensuite par Macron.
À la différence de cette gauche qui, au mieux, se contente de demi-mesures, nous ne pouvons plus accepter que la course aux profits dirige le monde jusqu’à sa perte. Il faut tout changer avec des mesures qui prennent le mal à la racine. La réussite des journées d’action dans la santé le 11 janvier et dans l’éducation le 13 janvier montre que le climat social est en train de changer. De nombreuses entreprises en grève, en particulier autour des salaires et des conditions de travail, témoignent d’une reprise des mobilisations. La journée de grève interprofessionnelle du jeudi 27 janvier peut constituer une nouvelle étape dans la construction d’un mouvement d’ensemble qui pourrait changer la donne, à commencer par le visage de cette triste campagne présidentielle.
La candidature de Philippe Poutou s’inscrit dans cette dynamique d’affrontement au système. Elle peut également contribuer à redonner confiance à notre camp social et lui permettre de dire que nos vies valent plus que leurs profits.