Nous avions engagé en juin des discussions avec Lutte ouvrière à qui nous avons proposé de faire campagne ensemble. Lors de notre dernière réunion, le 8 novembre, la délégation de LO nous a indiqué son refus.
Nous avions écrit, avant cette réunion, une longue lettre1 pour formuler une politique dépassant nos désaccords.
Les désaccords pointés sont le positionnement sur les institutions européennes ; la place des revendications contre toutes les oppressions, pour les droits des femmes, des LGBTI, l’antiracisme, les oppressions nationales, ainsi que la crise écologique ; la place accordée aux luttes sociales, car une campagne électorale peut et doit se faire le porte-voix des luttes et contribuer à les renforcer. Nous sommes d’accord sur beaucoup d’autres choses, l’opposition au gouvernement, la nécessité de renverser le capitalisme, du pouvoir des travailleurEs, etc.
Nous avons formulé une proposition qui, nous semblait-il, pouvait convenir à nos deux organisations. Sur les institutions européennes, nous avons proposé de dénoncer dans un même rythme l’UE et le gouvernement national, Macron et la bourgeoisie française. Nous avons proposé les éléments d’un programme qui « articule des revendications immédiates et des revendications transitoires, qui pose le problème de la propriété privée et de l’État, en un mot qui remette en cause le pouvoir des capitalistes et défende la perspective d’une Europe des travailleurEs et des peuples », en précisant les choses sur les revendications salariales, démocratiques, économiques, etc.
Enfin, nous avons abordé les enjeux d’une campagne commune, son importance dans la situation politique.
Quand c’est non, c’est non
Les camarades de LO ont reconnu que ce n’était pas les désaccords qui justifiaient le refus d’une campagne commune, qu’aucun désaccord entre nous n’était insurmontable. Ils ont rappelé qu’à plusieurs reprises, ces désaccords n’avaient pas empêché de mener campagne ensemble.
Mais il ont expliqué que, cette fois-ci, ils ne souhaitaient pas les dépasser car, étant donné la gravité de la crise du capitalisme, il fallait défendre « tout le programme », pour « convaincre les travailleurs de prendre le pouvoir » et que les autres points que nous voulions défendre « parasitaient » ce discours.
Nous leur avons fait part de notre étonnement, en indiquant que ce que nous défendons est un programme pour exprimer la colère du monde du travail, pour construire les mobilisations et poser la question du renversement du capitalisme par les exploitéEs…
Ils nous ont également indiqué que leur refus était lié à une appréciation de la situation politique qui nous semble catastrophiste, tout en indiquant que si elle devenait encore plus grave (« déclaration de guerre », « camps… »), il faudrait sans doute nous allier. Autrement dit, s’il était « minuit dans le siècle », ils seraient d’accord, mais pas à minuit moins le quart… Une forme d’attentisme illustrée par leur position sur le 17 novembre où ils indiquent qu’il ne faut surtout pas croire qu’on peut influer sur les choses, même localement.
Clairement, les camarades ne souhaitent pas de campagne commune, et une lettre devait nous arriver dans la semaine pour expliciter leur position.
Les arguments des camarades de LO ont varié au cours du temps, mais il semble surtout qu’ils ne veulent pas sortir de leurs positions propres, de leur « routine », pour se confronter à d’autres opinions, tenter de les intégrer comme une réfraction de discussions nécessaires au sein du mouvement ouvrier révolutionnaire.
Et maintenant ?
Le NPA est donc renvoyé à ses responsabilités. Puisque les camarades de LO veulent centrer leur campagne sur « la prise du pouvoir », il nous faut bien exister pour en dire davantage. Car, si nous voulons également convaincre que les exploitéEs doivent prendre le pouvoir, nous ne pensons pas que cela passe principalement par des « explications ». Nous pensons qu’il faut les combiner avec l’essentiel : l’expérience de la lutte, des liens qui se font dans la conscience entre différents éléments de dénonciation du capitalisme (crise climatique, assassinat des migrantEs, coût de la vie…) et la compréhension globale du système.
Nous n’avons donc pas d’autre choix que de tout faire pour être présentEs dans cette élection. Cela signifie pour nous une obsession à partir de maintenant : trouver le million d’euros nécessaire à l’impression des bulletins de vote et professions de foi, organiser une campagne politique militante pour exprimer la nécessité d’une opposition à la classe dominante, qu’elle s’incarne par l’UE ou par Macron, de la construction des mobilisations et du renversement du capitalisme.
Antoine Larrache et Christian Babel
- 1. En ligne sur https://npa2009.org/agir/politique/lettre-lutte-ouvriere-propos-des-prochaines-elections-europeennes-0, et publiée dans la revue l’Anticapitaliste du mois de novembre.