Aux élections départementales, 40 % des candidatures soutenues par EÉLV étaient des candidatures communes avec le Front de gauche. Mais aux régionales de fin d’année, EÉLV a décidé de se présenter seule...
Au premier plan médiatique de ce revirement, il y a la tribune de Cécile Duflot, la principale dirigeante d’EÉLV, contre le livre de Mélenchon, le Hareng de Bismarck (cf. l’Anticapitaliste n°291). Elle y critique le chauvinisme du dirigeant du Parti de gauche mais, sur le fond, la fonction politique de cette tribune est de donner un peu d’humanité à l’Union européenne, à coups de « Vive l’Europe ! ». Une divergence importante entre les deux courants, mais l’essentiel, moins reluisant, se résume à l’éternel problème du rapport au Parti socialiste.
L’autonomie contre l’explosionAu sein d’EÉLV, le débat a été rude, entre ceux qui veulent une plus grande autonomie vis-à-vis du PS, voire un rapprochement avec le FdG, et ceux qui rêvent de retourner au gouvernement. Parmi les premiers, les signataires avec des figures d’Ensemble d’une bien sage tribune « Alliance pour une nouvelle gauche », qui propose « la construction d’une “société du bien vivre” à même d’assurer à chacune et à chacun une vie meilleure ».Parmi les seconds, il y a l’inénarrable Jean-Vincent Placé, qui « prend de la distance » avec le parti, appelle à des listes communes entre le PS et EÉLV. Mais c’est en fait une bonne partie de l’appareil, des éluEs, qui tiennent fermement aux liens avec le PS, le parti qui leur permet de garder leurs postes, comme François de Rugy, coprésident du groupe écologiste à l’Assemblée nationale. Lorsque Cécile Duflot a quitté le gouvernement et tenté un rapprochement avec le FdG, ce secteur du parti a été jusqu’à menacer d’une scission.Le choix de la direction d’EÉLV semble donc assez simple : présenter des listes autonomes du PS... et du FdG (d’autant plus simple que le scrutin est proportionnel et devrait donc leur permettre d’avoir des éluEs), puis s’allier au PS dans les conseils régionaux. EÉLV peut ainsi apparaître différente du PS, tout en se permettant, selon le souhait de Placé, de « rester aux commandes de la région Île-de-France »... Et EÉLV de montrer immédiatement patte blanche auprès du gouvernement en soutenant la réforme du collège au moment où le gouvernement est à nouveau contesté.
Le mirage grecDu côté du FdG, les problèmes ne sont pas si différents. La ligne du secrétaire national du PCF, Pierre Laurent, est : « Moi, je vais continuer à être celui qui parle avec tout le monde, avec Christian Paul, Pouria Amirshahi, Emmanuelle Cosse, Jean-Luc Mélenchon… Je ne mets pas de barrières entre les uns et les autres », cela quand le PG propose aux frondeurs de quitter le PS pour les rejoindre...Tous ces courants, d’EÉLV aux composantes du FdG, y compris Ensemble, semblent donc focalisés par le mirage grec et espagnol : ils souhaitent reconstruire une nouvelle gauche, dans un contexte très différent de ces pays… tout en voulant l’assurance de conserver leurs postes d’éluEs, municipaux, départementaux ou régionaux. Une équation bien difficile à résoudre… et où manifestement ce sont les petits calculs pour garder les éluEs qui prennent le dessus. La logique institutionnelle est implacable !
Antoine Larrache