Une campagne est actuellement menée contre l'Allemagne, rendue responsable de tous les maux (capitalistes et gouvernement français n'y seraient pour rien !). Ainsi, Claude Bartolone, le président de l'Assemblée, appelle à une confrontation avec Merkel. Dans la foulée, la direction du PS a failli adopter un texte dénonçant l'« intransigeance égoïste » de Berlin.Tout ceci s'articule évidemment aux prises de positions d'un Montebourg sur le « patriotisme économique », censé permettre de « retrouver l'ADN historique de ce qu'a été le capitalisme français », c'est-à-dire « un modèle entrepreneurial innovant et d'essence patriotique » (!). Et Jean-Luc Mélenchon joue évidemment sa partition dans ce chœur. À propos de Chypre, il n'hésite pas à titrer un billet de son blog « En route vers l'Europe allemande »…
Fin de partie à l’ÉlyséeDans ce contexte, la conférence de presse de Hollande du 16 mai était attendue, tant à Berlin qu'à Bruxelles. Comme l'écrit le Monde, il a choisi « l'apaisement » et a commencé à reprendre à son compte les « conseils » de la troïka UE-BCE-FMI.Un jour avant, le président « normal » s'était d'ailleurs rendu à Bruxelles. Là, au côté de Barroso, il avait annoncé l'accélération du rythme des réformes dites « structurelles » (en premier lieu, les retraites). Le lendemain, Hollande a donc repris à son compte l'objectif d'un « véritable gouvernement économique de la zone euro », menant à une « union politique renforcée ». Les termes étaient visiblement choisis pour ne pas heurter l'équipe Merkel.Il s'agirait de discuter la politique économique, d'harmoniser la fiscalité, d'entamer la convergence des politiques sociales (« par le haut »), etc. Par contre, pas un mot sur les taux de change, alors que le niveau de l'euro handicape incontestablement les capitalistes français, italiens, etc. L'hétérogénéité de la fiscalité dans l'UE a permis depuis 30 ans que se développe le dumping fiscal. Qui peut croire que Merkel et Barroso puissent envisager de revenir dessus ? Idem en ce qui concerne les politiques sociales.
Une crise sans finEn arrière-plan, Paris cherche en fait à sortir du face-à-face actuel avec Berlin en renforçant le pouvoir de ses alliés traditionnels (Italie, Espagne…) face à celui de la BCE sous influence de l'Allemagne et de ses alliés. Mais, affaibli, en pleine récession, l'impérialisme français rencontre bien des difficultés pour imposer un compromis sérieux à son grand rival. Quant à Merkel, elle bénéficie à plein de la situation : la bonne santé de ses capitalistes se fait largement au détriment de ses « partenaires » et pas seulement ceux d'Europe du sud. Pour Berlin, le but est de doter l'UE de nouveaux outils de « discipline budgétaire ». S'il voit le jour, le gouvernement économique prôné par Hollande ne sera donc qu'un super gendarme de la zone dominé par l'Allemagne.Les discours « européens » de Hollande tente de masquer une nouvelle radicalisation de la politique anti-sociale et l'accentuation des rivalités entre puissances. La réponse est du côté des travailleurs et des peuples.
Pascal Morsu