Les résultats des élections européennes ont ouvert, à La France insoumise, une crise à la fois démocratique (qui n’est pas nouvelle) et une crise publique d’orientation entre « populisme » et « big bang de la Gauche ».
La question démocratique interne est sans aucun doute l’un des talons d’Achille de La France insoumise. Cela ne date pas des résultats des européennes,maisbien de la fin de la campagne présidentielle. En effet, depuis des mois, le manque de démocratie interne, la place hégémonique et dominante de Mélenchon sans oublier « l’affaire des perquisitions » ont mis à mal la FI. Un certain nombre de départs, ces derniers mois, de militantEs, de « personnalités ou de « cadres » en sont le reflet.
Dès la constitution de la liste des européennes, qui avait été présentée par Manuel Bompard comme un système inédit de désignation, les critiques ont été fortes, de même que celles, récurrentes, sur le fonctionnement du groupe parlementaire. Le départ le 8 juin dernier de Charlotte Girard, co-responsable du programme du candidat Mélenchon et de LFI, qui pointe dans un message diffusé sur Facebook, le fonctionnement et la démocratie interne, est un nouvel exemple que cette question est centrale pour un bon nombre de militantEs FI.
Mais comment ce manque de démocratie interne pourrait-il ne pas être central au vu de la construction même de la FI ? Un mouvement, comme l’a indiqué Mélenchon en décembre 2017 dans la revue Le 1, « gazeux » dont le « le but […] n’est pas d’être démocratique mais collectif », où aucune instance collective et instance de débat interne n’existe. Mais avec en revanche, contrairement à ce qu’affirmait Mélenchon, une véritable direction restreinte, et ce depuis le début, fonctionnant dans une opacité totale, autour d’un individu. Et aujourd’hui pour beaucoup, à la FI cet individu est le problème.
Pour essayer de résorber les critiques sur le fonctionnement, la FI organise, comme cela avait été le cas pour les européennes, une deuxième assemblée représentative les 22 et 23 juin prochains à Paris.À l’ordre du jour, les futures municipales bien évidemment, mais aussi un point « bilan d’étape et perspectives pour le mouvement »où les questions démocratiques vont s’inviter. Cela suffira-t-il pour éteindre la grogne ? Pas certain.
Jeu de stratégie
Mais la démocratie interne n’est pas le seul problème aujourd’hui pour la FI. Dès le soir des résultats, où la FI a fait à peine jeu égal avec un PS qu’elle avait enterré, les langues se sont déliées, remettant en cause la stratégie « populiste de gauche ». C’est Clémentine Autain qui a « ouvert le feu », avec notamment la publication d’un appel au « Big bang de la gauche ». Face à ce débat qui fait rage, l’équipe directionnelle restreinte a plus que jamais défendu la stratégie du populisme en défendant la nécessité de l’hégémonie ralliant le plus largement possible, au-delà de la gauche – et du clivage gauche-droite ?
Mais davantage que ces deux stratégies en débat, qui existent depuis le début dans la FI, la question posée aujourd’hui est : comment incarner une alternative à Macron et au capitalisme néo-libéral en ayant comme seule perspective une perspective électorale ?
C’est évidemment un questionnement central pour la FI, mais sans doute aussi plus largement. Pour notre part, l’urgence est de réfléchir aux intérêts de notre classe, et c’est dans ce sens que nous appelons à l’unité, de la base au sommet, dans l’action. C’est le sens de notre proposition d’une « coordination de la gauche qui lutte ». L’enjeu est de faire vivre un cadre de front unique dans la durée, qui contribue à la mobilisation de notre camp social et qui produise des actions communes régulières sur toutes les questions permettant de défendre les intérêts du monde du travail au sens large, que ce soit contre les licenciements, contre la répression des mouvements sociaux ou dans les quartiers populaires, contre telle ou telle loi gouvernementale ou attaque patronale, pour la justice sociale et climatique, contre l’extrême droite. Cela passe par l’interpellation des autres forces au niveau local comme au niveau national, voire par la participation à certains appels en fonction de leurs objectifs.
Sans nier les désaccords qui existent, par la discussion et la confrontation des points de vue, nous voulons contribuer à l’unité de notre camp social, pour agir. Sans aucune arrière-pensées électoralistes ou ambitions hégémoniques.
Joséphine Simplon