Publié le Jeudi 9 janvier 2014 à 18h26.

Front de Gauche : en temps de crise

La crise que connaît le Front de gauche vient de connaître un nouveau rebondissement avec le 4e congrès du Parti de la gauche européenne qui s’est tenu mi-décembre à Madrid en présence de 300 déléguéEs. 

Ce parti regroupe une vingtaine d’organisations européennes dont, pour la France, le PCF et le Parti de gauche. Seuls les PC restés les plus staliniens d’Europe en sont absents, comme les PC de Grèce ou du Portugal.

Dés-union européenne

Avec l’accord du PG,le congrès a voté trois initiatives qui ne mangent pas de pain : une campagne contre le grand marché transatlantique (TAFTA), l’organisation d’un sommet pour la restructuration de la dette en mars à Bruxelles et un « forum européen des alternatives » pour l’automne. Toujours avec l’accord du PG, 86 % du congrès a proposé Alexis Tsipras, le leader de Syriza, comme candidat à la présidence de la Commission européenne. Enfin un bureau a été élu avec des représentants de Syriza (Grèce), du Bloc de gauche (Portugal), du PCE (État espagnol), de la Gauche bulgare et de Die Linke (Allemagne).En revanche, le PG s’est opposé à la réélection de Pierre Laurent à la présidence du PGE, et a décidé en conséquence de suspendre sa participation au PGE jusqu’aux municipales, déclarant notamment : « la clarté de notre campagne aux européennes ne doit pas être mise en danger par la stratégie portée par Pierre Laurent de rejoindre la liste du PS aux municipales à Paris ». Pour ce dernier, « cette décision est incompréhensible pour nos camarades européens ». Même réaction chez Clémentine Autain de la FASE qui, tout en rejetant l’accord PS-PCF sur Paris, explique que pour le Front de gauche, « il n’y a pas de plan B pour les européennes ».

L’état de l’union…Pour bien comprendre cette crise, il faut rappeler que le Front de gauche est une coordination d’organisations, avec seulement quelques « indépendants » dans sa direction, et non un parti unifié comme le demandent certainEs en son sein.Il est composé du PCF (avec ses 8 000 éluEs), du PG avec l’orateur Mélenchon, quelque milliers d’adhérentEs et quelques dizaines d’éluEs, le PCOF, une moitié de Gauche unitaire dirigée par ­Christian Piquet (ex-LCR), et depuis peu Ensemble, regroupement qui réuni l’autre moitié de la GU dirigé par Francis Sitel (ex-LCR), la Gauche anticapitaliste (ex-LCR et NPA), Convergence et alternative (ex-LCR et NPA), la FASE (dont les Communistes unitaires), et un peu plus de la moitié des Alternatifs (l’autre moitié ayant refusé d’adhérer au Front de gauche).De fait, c’est bien le PCF et Mélenchon qui dominent le Front de gauche, un Front qui va se présenter aux prochaines municipales selon les villes sur des listes avec le PS ou contre lui, donc quelquefois divisé entre PCF d’un côté et reste du Front de gauche de l’autre. Mais à chaque fois, avec le même sigle !

Le débat d’abordAujourd’hui, le débat est assez violent et s’est envenimé suite à la prise de position du PG dans le cadre du Parti de la gauche européenne, un PG par ailleurs favorable à l’intervention militaire en Centrafrique à partir du moment où elle a été sanctifiée par l’ONU…Pour les directions, il ne s’agit pas d’une question de fond malgré les apparences. Mélenchon se moque des municipales et ne compte que sur les européennes où il espère remplacer Pierre Laurent comme tête de liste et « dépasser » le PS dans les urnes. Et pour le deuxième tour des municipales, c’est le silence radio, ce qui laisse entendre un accord avec le PS sous l’argument de « battre la droite ». Et déjà dans certaines villes, des sections du PG ont annoncé la couleur pour justifier de ne pas faire d’accords avec d’autres courants comme le NPA.Mais sentant une grande opposition des militants PCF, mais pas des éluEs, à toute alliance avec le PS, Mélenchon s’efforce de canaliser cette opposition de gauche, sans se rendre compte que même chez ces militantEs, son « style » ne passe pas…Mêmes compliqués, tous ces débats nous concernent car ils touchent des militantEs avec qui nous nous retrouvons souvent dans les mobilisations et qui pour la plupart sont à la recherche d’une véritable alternative anticapitaliste. Et dans ce domaine, personne n’a fait ses preuves et n’a de solution toute faite. En toute modestie, et en toute indépendance, nous apportons notre contribution politique, avec ces camarades comme avec celles et ceux qui ne veulent plus être mêlés à ces « jeux politiciens ».

Alain Krivine