Jeu de rôles, réelles divisions et désaccords, volonté de Marine Le Pen de s'imposer à la tête de son parti, il y a de tout cela dans l'apparente confusion qui a entouré le positionnement du FN sur la « manif pour tous » de dimanche. Ils n'y étaient pas tous mais tous soutenaient…«Le Front national appelle ceux qui, élus, cadres, militants ou sympathisants, veulent exprimer leur opposition à ce projet de loi en participant à « la manifestation pour tous » organisée le 13 janvier à retrouver sa délégation… » indiquait la motion du bureau politique du FN. Bien évidemment le FN était de tout cœur avec toutes celles et ceux qui partent en croisade pour les « règles fondatrices et plurimillénaires de notre société et de notre civilisation », le camp de la réaction la plus bornée. Mais il lui fallait bien tenter d'exister et Marine Le Pen a, elle, pris ses distances.Elle a soutenu « les élus, militants, sympathisants » du FN qui voulaient se joindre à cette manifestation « légitime » tout en dénonçant « ce qui est devenu une grossière tentative de récupération politicienne et d'enfumage sociétal de la part de l'UMP et du PS ». Comme Florian Philippot, vice-président du FN, elle n'a pas participé, contrairement à Bruno Gollnish, à Marion Maréchal Le Pen ou Collard, à ce qui est une « tentative de diversion de la classe politique au détriment des vrais problèmes des Français ». « C’est le rôle d’un responsable politique que d’avoir le courage et la lucidité d’expliquer aux Français les pièges dans lesquels on cherche à les faire tomber ».Difficile d'être le plus à droite…L'occasion pour elle de jouer sur plusieurs tableaux, d'autant que ses propres électeurs seraient partagés, « cinquante-cinquante », sur la question. Une raison de ne pas se mêler ni aux intégristes catholiques de Civitas ni à l’Église traditionaliste, et surtout de ne pas se solidariser d'une manifestation UMP-Jean-François Copé en lui donnant un label de parti d'opposition. Cette opposition de droite, c'est le FN et lui seul.Entre l’Église et l'UMP, Marine Le Pen a préféré garder ses distances pour préserver sa position, tout en laissant son parti afficher sa solidarité sans réserve avec tout ce que le pays compte de curés, d'intégristes et de réacs. Préserver son image de représentante du peuple face au milieu bourgeois traditionaliste, tout en dénonçant la classe politique UMP-PS pour ne pas se laisser détourner de sa propre croisade contre la mondialisation au nom du poison nationaliste. « PS, UMP sont des partis de la mondialisation, ce sont des partis mondialistes. Nous sommes nous le parti de la France. » affirmait-elle dans ses vœux.Cela ne l'a pas empêché de soutenir l'intervention « légitime » de l'armée française au Mali, « dans la mesure où notre pays a été appelé à l'aide par le gouvernement légitime du Mali en application d'une coopération de défense entre nos deux pays, dans une zone francophone ». Dénoncer la mondialisation, c'est pour elle une façon de défendre les intérêts des multinationales françaises qui profitent de la Françafrique et ont des visées sur les richesses minières du Mali. La démagogie de Marine Le Pen n'a d'autres ambitions, elle aussi, que de servir les intérêts des classes dominantes, contre les travailleurs et les peuples.Yvan Lemaitre