Le plus significatif dans les récentes déclarations de Manuel Valls sur la nécessité de « déverrouiller les 35 heures », c’est encore la justification qu’il donne à sa nouvelle provocation : « Est-ce que dans le monde tel qu’il est aujourd’hui, avec la concurrence que nous connaissons, nous pouvons nous permettre d’être sur des idées des années 1970, 1980 et 1990 ? » Rappel obsessionnel de la concurrence internationale, revendication de la modernité opposée à l’archaïsme des acquis sociaux : on croirait entendre… Laurence Parisot ! À ceci près que Manuel Valls est député PS et candidat proclamé aux primaires socialistes… En réalité, les « 35 heures » ne méritent ni les louanges décernées par les autres dirigeants PS ni les dénonciations horrifiées des libéraux. Il faut se rappeler qu’elles ont été « inventées » par Dominique Strauss-Kahn et mises en œuvre par Martine Aubry, lors du gouvernement de gauche plurielle de Lionel Jospin. Elles ont été considérées comme un progrès par les couches supérieures du salariat à cause de l’augmentation du temps libre, libéré du travail. Mais, pour toute une partie des salariés, notamment ceux qui sont confinés dans les tâches de production et d’exécution, elles ont surtout signifié annualisation du temps de travail, intensification des cadences et prétexte à la stagnation des salaires. Elles ont été présentées comme une espèce de troc : un peu de réduction du temps de travail contre beaucoup de flexibilité… ainsi que des allègements de charges sociales pour les patrons. Ce que propose Valls ? « Permettre aux Français, pour ceux qui ont la chance d’avoir un emploi, de travailler davantage – deux heures, trois heures… – sans avoir recours forcément aux heures supplémentaires qui ont beaucoup coûté à l’État ». L’arnaque complète : conserver la flexibilité, bien sûr. Et supprimer la réduction du temps de travail ! Il s’agirait donc, ni plus ni moins, de travailler plus sans pour autant gagner plus et, bien sûr, sans réduire le chômage. Aux « années 1970, 1980 et 1990 », Manuel Valls et les sociaux-libéraux préfèrent décidément le xxie siècle et son capitalisme sauvage…
François Coustal