Publié le Jeudi 8 décembre 2011 à 10h44.

Hollande fait les yeux doux à Bayrou

Le candidat socialiste n’hésite pas à solliciter dès aujourd’hui Bayrou pour tenter de s’assurer les votes des électeurs du centre droit.

Sur RMC et BFM TV lundi 28 novembre, la formule était il est vrai alambiquée mais le propos de Hollande était clair : il va être compliqué pour François Bayrou de maintenir la même ligne de neutralité qu’en 2007. Or justement, le candidat socialiste n’a aucune envie de faire la même erreur que Ségolène Royal, des appels du pied au dernier moment qui ressemblent un peu trop à du racolage entre les deux tours. C’est donc dès maintenant qu’il faut en parler : François Bayrou devra se rallier au futur vainqueur des présidentielles, et donc… à François Hollande selon toute vraisemblance. Avec à la clé une participation au futur gouvernement qu’il présidera…

Pour Bayrou, il est évidemment urgent d’attendre et d’installer sa candidature avant de miser sur le bon cheval. Et ce n’est pas garanti : l’état de grâce semble s’éloigner pour le candidat socialiste après les primaires. Mais il ne faut pas non plus fermer la porte. Interrogé sur les mêmes chaînes, l’intéressé s’est empressé de répondre le lendemain : « En tout cas, c’est quelqu’un que je respecte, même si je pense aujourd’hui qu’il est prisonnier d’un programme et d’alliances qui ne peuvent pas répondre aux difficultés du pays ».

Cette « danse du ventre des deux François » pour reprendre l’expression des journalistes n’est évidemment pas à prendre au pied de lettre. Il s’agit en premier lieu pour Hollande de consolider son électorat dont une partie vient du Modem mais qu’il faut amadouer, sait-on jamais… Sans que cette hypothèse ne soit non plus très originale : Mitterrand après les présidentielles de 1988 avait déjà fait l’expérience d’ouvrir son gouvernement à des ministres « centristes » venus de l’UDF.

Mais cela provoque quelques remous à gauche. Les Verts se sont empressés de rappeler que Jospin en 2002 avait perdu pour ne pas s’être déclaré suffisamment « socialiste ». En oubliant un peu vite que le récent accord PS-EÉLV (Europe Écologie-Les Verts) pour les législatives a été justement l’occasion pour le PS de ranger aux oubliettes le peu de mesures qui pouvaient sembler de gauche, avec un seul crédo : la réduction des déficits publics.

Le « projet humaniste » du Modem et de Bayrou est certes un vrai programme de droite. Mais par petites touches, François Hollande prend soin de rendre ses propositions chaque jour plus compatibles. Il le fait d’autant mieux qu’il a d’autres raisons qui dépassent les simples calculs politiciens : face à l’ampleur de cette crise, il faudra de toute façon assumer jusqu’au bout une politique d’austérité…. Ou rompre avec les logiques capitalistes.

Quant à Mélenchon, il s’est évidemment exclamé : le centre ou la vraie gauche, il faut choisir ! Aujourd’hui Mélenchon voudrait croire que l’ancienne fracture de 2005 est en train de se reconstituer. C’est évidemment un peu plus compliqué que cela.

Il faudra bien sûr s’opposer aux politiques d’austérité menée par le PS au pouvoir. Mais ce que fera le PS dépendra en réalité assez peu de ses alliances, avec le Modem ou avec le Front de Gauche, ou une partie de celui-ci. Cela dépendra pour l’essentiel de la crise et des exigences de la classe dominante, appelant une réponse qui ne pourra donc pas être pensée uniquement en fonction de l’arc des forces en présence, mais en fonction du contenu et de la nécessité d’une rupture avec les logiques capitalistes.

Jean-François Cabral