Publié le Mercredi 11 avril 2012 à 16h48.

Hollande ou l’agenda de l’immobilisme

Le PS a publié cette semaine ce qu’il appelle pompeusement « l’agenda du changement » et qui décrit les mesures que prendrait Hollande la première année de son quinquennat. Des mesures très, très mesurées...

Le PS voit un symbole dans l’annonce de la réduction de 30 % du traitement des ministres et du président. Mais pour prendre la mesure de l’audace, il faut savoir que Sarkozy s’était octroyé une rallonge de 172 % en 2007... Tout un symbole, donc.Il est aussi question de « redonner du pouvoir d’achat aux Français ». En fait, tout se résume à un blocage du prix de l’essence pour trois mois et à une hausse de 25 % de l’allocation de rentrée scolaire. Même un coup de pouce au Smic, quasiment bloqué depuis des années, n’est pas prévu...

Enfin, les lecteurs de Tout est à nous ! connaissent les dangers du futur traité européen « TSCG », qui durcit encore celui de Maastricht. À ce sujet, Hollande prévoit de « compléter et modifier » ce projet, il s’oriente déjà vers sa ratification en échange de concessions de forme.

Enfin concernant les étrangers, on annonce l’abrogation de la circulaire Guéant sur les étudiants étrangers (que même les patrons dénoncent). Mais pas un mot concernant l’abrogation de l’arsenal raciste et sécuritaire élaboré par Hortefeux puis Guéant depuis 2007...

Seul point notable : il est prévu de garantir le droit de partir à la retraite à 60 ans pour les personnes qui ont commencé à travailler tôt. Mais en creux, ceci signifie surtout la pérennisation des diverses mesures contre le droit à la retraite, en particulier la contre-réforme Fillon.Juillet 2012L’essentiel est sans doute que le document du PS annonce une loi visant à l’équilibre budgétaire pour 2017. Il y aura de nombreuses péripéties relativement à cette question. Mais Hollande est déjà sur le terrain de Merkel, Barroso and co : ce qui est à l’ordre du jour c’est l’austérité, c’est de faire payer la crise aux travailleurs.

On sait aussi que Hollande ne rechigne pas à dénoncer « la finance ». Une loi « d’assainissement » serait en gestation. Il suffira de dire qu’elle est actuellement négociée entre les milieux bancaires et l’équipe Hollande pour imaginer ce qu’on peut en attendre... Notons aussi que pas la moindre nationalisation de ces institutions qui tiennent littéralement le pays en otage n’est prévue.

Sur l’emploi, l’annonce d’une nouvelle « conférence nationale » tripartite permet à l’équipe Hollande d’éviter les sujets qui fâchent, comme l’abrogation des diverses réformes Sarkozy (retraites, hôpitaux, contre le droit de grève, etc.). On sait que ce type de conférence permet généralement l’alignement des directions syndicales sur les exigences patronales...

Enfin, même méthode concernant l’énergie, un « débat » aurait lieu – parions qu’il ne remettra pas en cause le nucléaire.

Seule annonce significative, l’abrogation de la TVA (dite) sociale de Sarkozy, encore que tout dépendra de ses modalités.Août 2012-juin 2013À ce stade, on annonce une réforme fiscale centrée sur la fameuse tranche d’imposition de 75 % au-dessus d’1 million d’euros (qui concerne le chiffre ridicule de 30 000 foyers fiscaux). Là encore, cela vaut refus d’un retour sur la « révolution fiscale » néolibérale. Menée au profit des plus riches depuis des décennies, elle a permis le transfert de milliards d’euros au bénéfice des plus riches et au détriment des foyers populaires...Il est aussi question de « lutte » (pas d’interdiction) contre les licenciements « boursiers ». De toute façon, en l’absence de contrôle du mouvement des capitaux, ces discours ne valent pas grand-chose.

Enfin, une loi de programmation pour l’éducation est annoncée, censée mettre en œuvre les fameux 60 000 recrutements. Rappelons que ces postes seraient trouvés par redéploiement, donc en accentuant la rigueur qui pèse sur tous les fonctionnaires.

Au final, on a donc quelques vagues déclarations d’intention qui laissent la porte ouverte à une politique qui s’adaptera aux exigences des banques et des gros actionnaires. Le NPA est évidemment favorable à « dégager Sarkozy », mais bien naïf serait donc celui qui se ferait des illusions quant au programme de Hollande !

Pascal Morsu