Le Président de tous les reniements a choisi le quotidien économique et financier du milliardaire Bernard Arnault, Les Echos, pour donner une interview-fleuve où il liquide toutes les références de la gauche, même réformiste.
Dans cette interview publiée ce 30 juin, Hollande, avec une assurance de façade, définit à la fois ce que sera son action dans l’année qui va jusqu’à la présidentielle, et esquisse le profil de sa future campagne.
Face au Brexit et à ce qu’il traduit, il ne fait pas la moindre autocritique de la politique de l’Union européenne (UE). à une question sur l’euroscepticisme, il répond par une tirade sur la montée des « populismes » : un terme destiné à mettre dans le même sac extrême droite et critiques de gauche de l’UE. La première priorité qu’il voit pour relancer l’UE, c’est la « la sécurité, le contrôle des frontières extérieures, la lutte contre le terrorisme, la défense ». Il faut augmenter les dépenses militaires. Pour le reste, il énumère des pistes de réforme économique totalement inscrites dans la logique néolibérale, aucune avancée sociale significative n’est à l’ordre du jour en Europe.
Pour ce qui est de la France, tout d’abord, aucune concession sur la loi El Khomri (notamment l’article 2 sur les accords d’entreprise), et le 49-3 sera à nouveau utilisé si nécessaire. L’action de la police est totalement justifiée. Quant au patronat, il a droit à une petite tape sur la négociation Unedic... mais les milliards vont continuer de tomber : le CICE va encore augmenter, l’impôt sur les sociétés va baisser pour les PME, et la prime à l’embauche pour les PME va perdurer. La compression des dépenses, notamment sociales, va continuer mais un impôt va baisser : pas la TVA mais l’impôt sur le revenu. Une baisse qui concernera non les bas revenus mais les prétendues « classes moyennes ». Peu importe au Président le diagnostic de l’INSEE sur l’augmentation des inégalités. Et pour après les présidentielles, il faudra continuer, car tout ce qui a été fait depuis 2012 va dans la bonne direction.
Un scénario à l’italienne ?
Hollande refuse toute accusation de trahison. Il regrette que la révision constitutionnelle sur la déchéance de la nationalité n’ait pas abouti. à Notre-Dame des Landes, les travaux vont s’engager et la ZAD sera évacuée. Quant aux institutions, une chose est claire : il ne faut pas toucher au pouvoir présidentiel : « nos institutions m’ont permis d’intervenir au Mali en quelques heures… et de parler aux Conseils européens avec plus de force que d’autres ». Ce qui sous-entend que le débat parlementaire, obligatoire dans d’autres pays européens avant les décisions importantes, est une perte de temps. Pour les présidentielles, il faut rassembler la « gauche de gouvernement ». Quant à la « gauche de contestation », elle ne voudrait pas vraiment gouverner et ferait le jeu de la droite et de l’extrême droite...
Ces déclarations de Hollande valent pour le présent et l’avenir. Il crache sur ce qu’ont été les valeurs affirmées par la gauche. Face à la droite et à Le Pen, il veut apparaître comme la solution réaliste et un rempart contre le « pire ». Mais son objectif est en fait de réussir à imposer une configuration à l’italienne, où la gauche a disparu du Parlement au profit de combinaisons centristes directement liées à des fractions du grand patronat.
Pourtant, lui et les autres dirigeants européens dansent sur un volcan dont le référendum britannique est une fumerolle. Aux anticapitalistes et révolutionnaires de reconstruire une alternative et un espoir de victoire… Certes, le mouvement contre la loi travail montre que des éléments en existent, mais, d’une façon totalement différente des années 70, une expression de Daniel Bensaïd a retrouvé son actualité : l’histoire a recommencé de nous mordre la nuque.
Henri Wilno