Le mini-remaniement ministériel qui a suivi les législatives offre deux places aux Radicaux de gauche, dont les différences avec le PS sont pour le moins ténues. Par ailleurs, Batho remplace Bricq à l’écologie, ce qui n’est pas forcément une bonne nouvelle.
Hollande et Ayrault ont remanié leur gouvernement à l’issue des législatives. On peut se demander pourquoi, puisqu’ils ont obtenu la majorité absolue des députés pour leur « changement », et que tous les ministres ont été élus ou réélus. Il ne s’agit pas non plus d’ouvrir le gouvernement aux communistes et au Front de Gauche, puisque ceux-ci (heureusement) s’y refusent.
L’objectif semble être d’offrir quelques ultimes récompenses aux fidèles et aux ralliés de la majorité présidentielle, en échange de leur complète loyauté. Il y a quatre nouveaux ministres, dont deux radicaux de gauche, l’une à l’artisanat et au commerce et l’autre à la décentralisation.
Le charismatique leader du parti des Radicaux de gauche, Jean-Michel Baylet, s’est donc « félicité que les radicaux de gauche aient toute leur place dans le gouvernement », c’est-à-dire… à égalité avec les écologistes. C’est sûr que cette composante de la majorité, tout le monde connaît bien l’originalité de ses idées et de son programme, et la grande différence avec les socialistes ! Le citoyen radicalisé, soucieux de trouver une solution face à la crise, se prend donc à rêver : à quand un gouvernement Ayrault iii qui offrira un sous-secrétariat aux espaces verts et aux latrines municipales à l’un de ces radicaux de gauche ou autres « divers gauche » qui ont tant à apporter au « changement » ?18 députés verts On est dans la même logique désormais avec Europe Écologie Les Verts. Ils ont eu leurs dix-huit députés (huit de plus que le Front de Gauche) grâce à l’accord passé (de capitulation politique, aussi bien économique qu’écologique) avec le Parti socialiste en novembre 2011. Ils ont leur récompense, un groupe indépendant à l’Assemblée et des places au gouvernement. Mais pour en faire quoi ?
En tout cas, voici la direction d’EÉLV ravie, dont la direction s’est fendue le soir du remaniement d’un communiqué titré : « Les écologistes sont là, et cela va se voir ! » Sauf que justement, silence radio dans ce communiqué sur ce qui est le remaniement gouvernemental le plus important et qui aurait dû tout de même les faire tiquer : la sénatrice socialiste Nicole Bricq perd le ministère de l’Écologie au profit de Delphine Batho (une très proche de Ségolène Royal, histoire soit de consoler la vaincue de La Rochelle, soit d’acheter sa garde rapprochée pour lui ôter le pouvoir de se venger ?).Bricq contre ShellNicole Bricq, qui se disait la veille encore « passionnée de problèmes écologiques », serait maintenant « très heureuse de la mission qui lui a été confiée » de prendre le ministère du Commerce extérieur, selon Najat Vallaud-Belkacem, porte-parole du gouvernement et ministre de la langue de bois. Mais n’y aurait-il pas ici la sanction d’un excès de zèle… écologique, de la ministre ? Elle venait tout juste de suspendre les permis de forage en haute mer concédés à la firme pétrolière Shell, au large de la Guyane. Une activité qui pourrait avoir des conséquences catastrophiques pour l’environnement. Et en plus Nicole Bricq annonçait la refonte du vieux code minier français, plus favorable aux intérêts des industriels qu’à l’environnement. La ministre a donc été écartée, les permis de forer signés. Shell est satisfait… et les Verts muets.
Décidément, le diable est dans les détails, et ce mini-remaniement gouvernemental, mine de rien, en dit long sur les intentions de Hollande et son équipe : la discipline parlementaire et gouvernementale au service de la discipline budgétaire à la sauce austéritaire. Avec menues récompenses pour les godillots volontaires de la « majorité pour le changement ».