Publié le Jeudi 26 avril 2012 à 20h37.

Le PS en tête

À l’évidence, François Hollande émerge comme le grand vainqueur de ce 1er tour. Fait sans précédent sous la ve République, l’ex-premier secrétaire du PS devance le chef de l’État en titre. On pourrait aussi rappeler que jamais un candidat PS n’avait été en tête au 1er tour à Paris... En fait, on voit avec le tableau ci-dessous qu’avec la candidature Hollande, le PS retrouve le niveau électoral des années Mitterrand, ce qui n’est pas rien.Résultats du candidat PS au 1er tour présidentielle (% exprimés) 2012 (Hollande)    28,63 %    1988 (Mitterrand)    34,11 %2007 (Royal)    25,87 %    1981 (Mitterrand)    25,85 %2002 (Jospin)    16,18 %    1974 (Mitterrand)    43,25 %1995 (Jospin)    23,30 %        Ceci étant, il faut pousser l’analyse plus avant.Sociologie...Sociologiquement, un sondage Ifop « sortie des urnes » est instructif. Hollande réaliserait son meilleur score chez les diplômés de l’enseignement supérieur (34 %) et le pire chez les non-diplômés (21 %). Le socle électoral du candidat social-­libéral, ce sont bien les couches supérieures du salariat. En ce qui concerne le cœur de la classe ouvrière, il est évident que Mélenchon et Le Pen ont âprement disputé cet électorat au candidat socialiste : 50 % des non-diplômés auraient voté Le Pen et 16 % pour le candidat du Front de Gauche. Le cas du Pas-de-Calais, département populaire et socialement sinistré, est significatif. L’extrême droite y progresse : la décrue du vote UMP profite d’abord au FN (de 13 à 20 % des inscrits entre 2007 et 2012) et de façon beaucoup plus limitée aux candidats situés à gauche du PS (avant FdG). Par contre, la progression de Hollande par rapport à S. Royal est limitée – de 20,57 à 23,07 % des inscrits. Le prix d’une campagneCandidat surprise du PS après que le directeur du FMI (tout un symbole !) n’a pu le « représenter », Hollande s’est évertué à ne rien promettre et s’en est tenu à surfer sur le rejet profond de Sarkozy dans le pays. Il l’a fait au nom d’un parti qui occupe certes la place de la social-démocratie, mais dans un rapport de plus en plus éloigné de la classe ouvrière. Rares sont encore les militants authentiques dans ce parti de professionnels de la politique institutionnelle qu’est désormais le PS social-libéralisé. Dans ces conditions, rien de surprenant à ce que les couches les plus menacées par la crise capitaliste ne se retrouvent que modérément dans la campagne fade menée par Hollande. En ce sens, le vide de la campagne socialiste n’est pas pour rien dans le score du FN (on notera d’ailleurs qu’une fraction non négligeable des électeurs de Le Pen voteront contre Sarkozy le 6 mai). PerspectivesTout indique que Hollande peut gagner le 6 mai, il faut s’en féliciter – chasser Sarkozy est évidemment indispensable. Mais tout indique aussi que de larges masses d’électeurs populaires utilisent le vote Hollande sans réelle adhésion à l’orientation politique du candidat. On notera l’absence de scène de liesse à l’annonce des résultats du 1er tour... Dans le cas (probable) de la victoire de Hollande le 6 mai, il est donc évident que celui-ci ne pourra gouverner sans nouer des relations étroites avec les forces qui gardent un pied dans le monde du travail, les quartiers – le PS seul ne suffira pas. C’est ainsi que doit être comprise son annonce de conférence sociale (pour les directions syndicales) ou ses appels du pied au Front de Gauche.

Pascal Morsu