Publié le Lundi 26 avril 2021 à 16h00.

Les Nôtres : Gérard Chaouat (1944-2021)

Gérard Chaouat est décédé vendredi 23 avril. Ex-militant du NPA et de la LCR, membre d’ENSEMBLE, immunologiste renommé, Gérard était un camarade précieux, que nous retrouvions dans toutes les luttes et qui acceptait toujours de répondre à nos sollicitations lorsque nous lui demandions d’écrire pour notre presse ou de participer à nos émissions en ligne ou à l’université d’été du NPA. Pour lui rendre hommage, nous publions plusieurs textes écrits par divers camarades et structures, qui donneront une idée à nos lecteurEs de la personnalité et de l’investissement militant de Gérard. Hasta Siempre camarade !

Pour un recensement plus exhaustif des réactions, voir sur le site d’ESSF.

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Un parcours militant exceptionnel

Notre ami et camarade Gérard Chaouat vient de nous quitter. C’était un ami que beaucoup d’entre nous connaissaient. Mais c’était aussi un parcours militant exceptionnel.

Né en 1944, il fait de la lutte contre l’extrême droite pro-Algérie française au Quartier Latin son premier combat au sein du Front universitaire antifasciste (FUA). Il se situe ainsi dans la génération militante qui, imprégnée des récits des horreurs de la Seconde Guerre mondiale, refusa le comportement de l’armée française en Algérie. Ces militant.es ont été à l’origine de la radicalisation qui devait déboucher sur mai 68. Une radicalisation qui, pour Gérard et ses camarades, est passée de l’Algérie au Vietnam, combat emblématique de ces années. S’étant orienté vers les études médicales, il apporta son soutien actif à la lutte pour le droit à l'avortement en pratiquant de manière illégale des avortements clandestins avant le vote de la loi Veil.

Gérard rejoignit la JCR, la Ligue et la Quatrième Internationale. Il fut également un militant syndical au Syndicat des chercheurs scientifiques de la FEN, puis de la FSU (il était encore récemment membre de son service d’ordre). Il n’hésitait jamais à accomplir une tâche militante, ses camarades du XXe arrondissement de Paris le savent.

D’origine juive, il mettait un point d’honneur à être déterminé dans son soutien à la lutte du peuple palestinien. Il animait à ce titre la commission Palestine d’Ensemble et s’était rendu sur les lieux avec une délégation de notre mouvement.

Chercheur en immunologie, directeur de recherche émérite au CNRS, passionné par son travail (il allait encore au labo ces derniers temps), il faisait toujours le lien entre ses préoccupations scientifiques et les aspects politiques de la recherche et de la médecine, si essentiels en ces temps.

ENSEMBLE rend hommage à son parcours militant, un parcours fait de fidélité à nos idéaux, quels qu’aient été les aléas du militantisme des années qui suivirent 68. Son histoire est la nôtre, son départ est notre tristesse.

L’équipe d’animation nationale d’ENSEMBLE

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Un militant infatigable

La section Paris 20e du NPA est extrêmement choquée et attristée d’apprendre le décès de Gérard Chaouat. Beaucoup d’entre nous partagent une longue histoire militante avec Gérard, pour d’autres l’histoire commune a commencé avec la fondation du NPA en 2009.

Depuis 2012 Gérard a fait un autre choix avec la Gauche anticapitaliste et puis Ensemble ! Néanmoins nous avons continue à militer ensemble dans des différentes activités unitaires du 20e arrondissement.

Gérard était un internationaliste convaincu et on se retrouvait également dans les actions de solidarité internationale. Un militant pour le droit des femmes à l’IVG dès le première heure on se retrouvait également au sein du Collectif IVG de Tenon.

Un militant infatigable et en même temps un grand spécialiste en immunologie reconnu internationalement, Gérard était aussi d’une grande chaleur humaine. Il nous manquera.

Nos condoléances à tou.te.s ses proches.

La section Paris 20e du NPA

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Docteur de très haut niveau et militant de terrain

Sur ces listes nous sommes nombreux à l’avoir découvert sur Zoom ou Jitsi, lors des réunions du collectif Brevets sur les vaccins contre la covid, stop. Réquisition, ou lors des réunions de l’Appel de Paris. A avoir écouté ou animé avec lui des débats sur les vaccins, les brevets, la lutte contre la covid. Mais Gérard, c’est bien plus que cela. Tout un pan de notre histoire et de nos colères.

Immunologiste de la reproduction, pasteurien, directeur de recherche au CNRS, syndicaliste et militant politique, Gérard Chaouat est décédé le 23 avril. Jamais avare de ses explications savantes, toujours pédagogiques. Jamais le dernier à manifester, à agir, à bouger. Il faisait d’ailleurs partie du service d’ordre de son syndicat !!

Sandrine Caristan, chercheuse chez Sanofi et militante du collectif anti-sanofric m’a informé de son décès. Le temps de regarder mes mails et de nombreux témoignages affluaient. Preuve de ses nombreuses vies !

Il est possible de lire sa biographie sur le dictionnaire Maitron du mouvement ouvrier. Une biographie en forme de révision de l’histoire de notre siècle, entre guerre d’Algérie, métro Charonne, IVG et Planning familial, exclusion du PCF pour trotskyste, LCR puis NPA avec tous ses débats, puis Ensemble, la Palestine, les brevets sur les vaccins anti-covid.

Frank Prouhet

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Au temps de la guerre d’Indochine

Mes souvenirs de Gérard remontent aux années 60-70, quand nous luttions contre l’escalade militaire US en Indochine – une guerre totale, prolongée, sans équivalent, menée sur tous les terrains.

Le Vietnam était alors, véritablement, l’épicentre des conflits mondiaux : révolution et contre-révolution, bloc de l’Ouest contre bloc de l’Est, montée en puissance de la confrontation sino-soviétique… Dans ce contexte très spécifique, la solidarité internationale a joué un rôle important dans la période précédant la défaite impérialiste. Gérard en était très conscient et s’attachait tout particulièrement aux données géopolitiques et à la nature du soutien que le Vietnam recevait, au Nord, de la part de l’URRS (ou de la Chine) : de quoi tenir, mais pas de quoi gagner, avec en perspective une nouvelle négociation entre grandes puissances pour redéfinir le compromis imposé au PCV en 1954. Comme d’autres l’ont déjà noté ici avant moi, c’est pour cela que Gérard s’attachait à analyser la nature de l’armement reçu par Hanoi, en le comparant à l’armement qu’il aurait pu recevoir, mais dont il était privé. Il aurait été idiot de prétendre que Hanoi ne recevait pas d’aide, mais il importait de démontrer précisément les limites militaires et politiques de cette aide.

Nous n’avons pas eu l’occasion de militer véritablement ensemble les décennies qui ont suivi, mais Gérard était de celles et ceux qui donnent envie de changer le monde.

Pierre Rousset

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Gérard laisse une trace profonde

‌Comme en témoignent les nombreux messages qui ont suivi l’annonce du décès de Gérard Chaouat, il a laissé une trace profonde dans la vie de ceux qui l’ont connu ou croisé ; sans doute en raison de la sympathie évidente qu’on ne pouvait manquer d’éprouver pour ce grand bonhomme, simple d’abord mais dont on sentait rapidement la détermination et la solidité des convictions : une balise et souvent un repère.

Je l’ai connu il y a 55 ans, quand je suis arrivé à la fac de médecine de Paris. Il avait quelques années de plus que moi et nous avons tout de suite lié une amitié qui a duré plus d’un demi siècle. En ce temps-là avant 68, on se voyait très souvent pour discuter politique bien sûr, mais aussi de tas de choses : il était un puit de science et de connaissance, toujours avide d’aller à la racine des choses.

Plusieurs ont parlé de son expertise technico-militaire sur l’armement russe au Vietnam. Je me souviens encore avec grande émotion de notre accablement en 67 quand nous avons appris la mort du Che en Bolivie. Je ne voulais d’abord pas y croire ; nous avons discuté tard dans la nuit de ce que cela signifiait. Et lui pressentait déjà ce que l’évènement impliquait quant à l’évolution de la direction cubaine qui avait finalement lâché Guevara...

Je me fichais gentiment de lui quand on se revoyait, en lui disait : « Mais tu ne changes pas, Gérard ! ». A qui il me répondait invariablement : « Tu n’es plus matérialiste, Charles, on vieillit, on change et le monde n’a pas changé comme nous l’espérions... » Mais pour moi, il était toujours cette grande silhouette synonyme d’une fidélité à toute épreuve, alliage étrange de professeur Nimbus et de révolutionnaire professionnel en habit de scientifique de très haut niveau.

Gérard était vraiment impressionnant pour ces raisons, en même temps qu’extrêmement chaleureux, amical et fraternel. Dans les discussions politiques, même quand on n’était pas d’accord, les échanges privés ou publics étaient toujours empreints de respect et de la joie de se savoir toujours embarqués sur la même galère.

Repose en paix, Gérard, vieux frère.

Charles Michaloux