Le premier tour de la primaire de la « Belle alliance populaire » marque une nouvelle étape de la crise du PS. Seul Cambadélis, assis sur son fauteuil de premier secrétaire, semble se réjouir d’un résultat qui ne masque pas le processus d’implosion en cours...
Malgré l’ajout de 350 000 faux votants à la dernière seconde, la direction du PS est obligée de reconnaître qu’il y en a trois fois moins que pour la primaire de la droite. Cette faible participation, pour la modique somme de 1 euro, montre la distance prise vis-à-vis du PS par sa base électorale habituelle.
Une seule solution, c’est Benoît Hamon ?
On ne peut que se réjouir de la deuxième claque reçue par Valls, dont la campagne ressemble à un gag aussi honteux que la politique qu’il a menée. Pour certains votantEs, la victoire de Hamon est donc une revanche sur Hollande et Valls, sur la dérive de plus en plus droitière du PS. Mais on ne peut pas y voir pour autant une issue pour le mouvement ouvrier.
Car Hamon s’est certes démarqué du gouvernement sur l’état d’urgence et la loi travail, mais on n’oublie pas son bilan du quinquennat : « un goût d’inachevé, comme si on était resté au milieu de gué ». Quoi ? Aurait-il fallu davantage réprimer, casser le code du travail, intervenir militairement ? Hamon accepte les exécutions ciblées, ne renie pas plus son passage au ministère de l’Éducation, avec le mensonge de la création de 60 000 postes… Il n’est pas parti du gouvernement, mais en a été évincé pour ses critiques – modérées – envers l’orientation de Valls. Et pour cause : il faisait partie de la majorité au dernier congrès du PS… et a même contribué, avec son comparse Montebourg, au remplacement de Ayrault par Valls ! À une exception près, il n’a pas voté les motions de censure contre le gouvernement… mais a voté tous les budgets !
Son programme ne propose pas d’amélioration réelle pour les salariéEs. Son projet de revenu universel est une simple augmentation du RSA de 10 %, et pas un mot sur la réquisition des logements vides ou contre le CICE… Le site de Hamon est un modèle de publicité mensongère, une compilation de propositions indigentes. Ainsi, lorsque l’on clique sur « Une nouvelle étape dans le partage du temps de travail », on apprend que Hamon est favorable aux temps partiels et aux 35 heures… Quel changement !
« Quand le lion est mort, les chacals se disputent l’empire »1
Le Parti socialiste est délabré. Macron tente de rallier à sa candidature la droite du PS, celle qui est ouvertement procapitaliste. Avec lui, ce secteur espère maintenir les postes d’éluEs et couper enfin les ponts avec la gauche.
De son côté, le cœur de l’appareil du PS aura bien du mal à soutenir le « frondeur » Hamon, qu’il hésitait à exclure au moment des votes de défiance… Et certains militantEs craignent ouvertement l’explosion à brève échéance.
De l’autre côté, les soutiens à Mélenchon ont multiplié les déclarations contre Hamon… au point de se demander s’ils ne préféreraient pas Valls ! Ils craignent la victoire du candidat de la « gauche du PS », car Mélenchon aura plus de mal à se différencier du probable futur candidat du PS, lui qui a aussi été ministre d’un gouvernement de gauche. Sur certains sujets, comme les migrantEs et les questions internationales, les positions de Mélenchon sont même plus à droite que celles de Hamon ! Et sur les salaires, on ne voit pas bien les différences...
Rompre avec cette vieille gauche, vite !
Décidément, rien ne se passe comme prévu dans cette primaire : l’émergence de Macron, l’abandon de la bataille par Hollande et le PCF, la défaite annoncée de Valls… Le point commun est l’usure des partis qui gèrent les affaires du capital, dans un monde touché par une profonde crise économique, sociale, écologique, morale et politique.
Il n’y a pas de solution pour le mouvement ouvrier dans la candidature de Hamon, pas plus d’ailleurs que dans celle de Mélenchon (dont les soutiens s’illustrent par exemple dans la gestion libérale de la ville de Grenoble). La chute du Pasok (le PS grec), puis les trahisons de Syriza, comme en France la chute actuelle du PS en France, les discours chauvins de Mélenchon ou la mollesse des mots d’ordre sociaux de ces candidats ont les mêmes racines : la tentative, quelle que soit la sincérité des militantEs qui les soutiennent, de gérer le système, dans le cadre de ses institutions, et le refus de l’affrontement avec le capital.
Ce lundi 23 janvier, notre camarade Philippe Poutou, candidat à l’élection présidentielle, était en grève pour sauver les emplois chez Ford, pendant que le PS bidouillait, que les soutiens à Mélenchon vociférait contre ces trucages, et que les journalistes commentaient... C’est de ce côté, celui des luttes des travailleurs, de la reconstruction d’un rapport de forces pour défendre nos intérêts, et d’un programme de rupture avec le capitalisme, que se situe la solution. Quand Hamon défend le revenu universel à 600 euros (financé on ne sait comment), nous revendiquons la continuité du salaire à hauteur d’un SMIC à 1 700 euros net et l’interdiction des licenciements. Quand Mélenchon dérape sur la question des travailleurs détachés ou sur ses réponses à la « crise des migrants », nous revendiquons les mêmes droits pour touTEs, la liberté de circulation et d’installation.
Avec pour objectif de construire une force politique qui défende les intérêts des oppriméEs et des exploitéEs, jusqu’au bout.
Antoine Larrache
- 1. Dixit les Tontons flingueurs