Lundi 6 octobre, Manuel Valls était à Londres pour vanter la politique économique française devant une assemblée de financiers. Financiers et patrons sont les seuls interlocuteurs qui comptent pour la bande Hollande-Valls et leurs sbires. C’est ce que montrent les textes budgétaires qui vont être présentés au Parlement.
Les projets budgétaires du gouvernement pour 2015 s’énoncent, comme chaque année, dans deux textes : le projet de loi de finances (budget de l’État) et le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Le budget de l’État a aussi des conséquences sur le budget des communes, régions et départements, car l’État leur a transféré des attributions (notamment en matière sociale et éducative) avec comme contrepartie des transferts financiers.
Quand on aime le Medef, on ne compte pas...Le fil directeur des textes qui vont être discutés au Parlement, c’est le Pacte de responsabilité (qui a succédé au Pacte de compétitivité). Les milliards vont continuer à pleuvoir pour le patronat : comme le déclare le ministre des Finances Michel Sapin, « nous tenons nos engagements ». Les dispositifs en faveur des entreprises vont poursuivre leur montée en puissance, en particulier le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et les allègements supplémentaires de cotisations sociales patronales.Le budget 2015 entérine aussi une baisse de certaines taxes pesant sur les sociétés, notamment la C3S (contribution sociale de solidarité des sociétés). Emporté par son élan, le gouvernent renforce aussi le CICE et le crédit d’impôt recherche pour les départements d’outre-mer, alors que la Cour des comptes a critiqué l’efficacité des mesures de ce type. Mais, que voulez-vous, quand on aime, on ne compte pas…
Coupes – très – sombres pour la majoritéC’est sur la majorité de la population que vont peser les 21 milliards d’économies annoncés : 9,6 milliards pour la Sécurité sociale, 7,7 milliards pour l’État, 3,7 pour les collectivités locales. Cela va se traduire par des salaires bloqués pour les fonctionnaires, des services publics dégradés ou des coupes dans l’assurance maladie (notamment dans les hôpitaux). La première tranche de l’impôt sur le revenu est supprimée, mais la redevance télé augmente, de même que la taxe sur le gazole, sans oublier la TVA augmentée pour financer le CICE... Quant aux collectivités locales, elles vont devoir sabrer dans leurs dépenses.Aux termes mêmes des projets budgétaires, le déficit public ne baissera pratiquement pas en 2015 tandis que la dette publique atteint les 2 000 milliards d’euros. La faiblesse de la croissance pèse sur les recettes fiscales (la TVA, par exemple, dépend de la consommation).De plus, le scénario budgétaire du gouvernement est basé sur un rebond – faible – de la croissance qui passerait en 2015 à +1 %, après 0,4 % en 2014. Au vu de la situation actuelle de l’économie, ce 1 % apparaît de moins en moins crédible : la baudruche de la reprise, maintes fois annoncée par Hollande, est crevée.Du coup, le budget français n’est pas dans les clous du traité budgétaire européen et va sans doute soulever des critiques à Bruxelles et du côté d’Angela Merkel. Mais Hollande va pouvoir plaider sa cause : les mesures qu’il prend, budgétaires ou autres, vont dans le sens des revendications patronales, en dernière analyse le critère suprême des institutions européennes.
Censurer le gouvernement PS-MedefHollande a parlé avec mépris des « cris » déclenchés par les mesures d’économies (« Les économies forcement sont douloureuses » a-t-il dit...). Les privilégiés n’ont pas besoin de crier, juste de murmurer pour se faire entendre de ce pouvoir. Les travailleurEs, les chômeurEs, les retraitéEs, eux, vont devoir crier fort et surtout agir fort.Compter sur les états d’âme de certains députés PS serait une illusion dangereuse : Benoît Hamon, ex-ministre et responsable d’un des courants de « gauche » du PS vient de déclarer qu’il ne voulait pas voir sa « famille politique » échouer. Eh bien non, il faut que Hollande et Valls échouent dans leur entreprise de démolition sociale ! Dans les semaines à venir, il va falloir s’emparer de toutes les occasions possibles de censurer ce gouvernement dans la rue et par la lutte sociale. Malgré ses limites, la journée du 16 octobre organisée par la CGT sera utilisée par certains travailleurEs pour exprimer leur mécontentement. Il faut souhaiter que les discussions engagées entre les organisations de la gauche sociale et politique, dont le NPA, qui avaient appelé à la manifestation du 12 avril, débouchent sur une manifestation anti-gouvernementale d’ampleur nationale en novembre à l’occasion du vote du budget. Mais pour nécessaire qu’elle soit, une telle manifestation devra être suivie de mobilisations sociales massives pour mettre en échec une politique qui ne profite qu’aux capitalistes.
Henri Wilno