Le congrès du NPA a donc abouti à une séparation. Une situation regrettable, mais inévitable, dont nous souhaitons qu’elle soit le début d’un nouvel élan pour le NPA.
La situation était devenue intenable depuis plusieurs années. On a coutume de dire qu’un parti ne peut reposer que sur une « compréhension commune de la situation et des tâches » : de ce point de vue, les positions des unEs et des autres étaient de plus en plus éloignées. Concernant l’analyse de la situation, les divergences étaient très importantes, les camarades sous-estimant le danger fasciste inscrit dans la situation et surestimant l’ampleur des mobilisations et le niveau de conscience du prolétariat.
Des divergences insolubles
Sur les tâches de la période pour les révolutionnaires, les divergences sont encore plus fortes. D’une part, l’analyse que nous faisons du recul de la conscience de classe nous amène à considérer qu’une politique de front unique résolue est absolument nécessaire. Ainsi, il faut être capable d’intervenir dans les débats qui secouent actuellement La France insoumise sur la question des violences faites aux femmes et sur l’absence de démocratie interne. Cette crise est en grande partie liée au rapport de cette organisation aux institutions. Pour intervenir auprès de ses militantEs, nous avons besoin d’être perçus comme des partenaires, pas comme des adversaires.
Concernant la mobilisation nécessaire dans les prochaines semaines pour les retraites et les salaires, contre le « travailler plus pour gagner moins », nous devons combiner un travail résolu pour l’unité des organisations avec la construction de processus d’auto-organisation à la base, réellement unitaires, ne regroupant pas seulement les éléments les plus militants, tout en avançant des mots d’ordre de rupture avec le pouvoir de la bourgeoisie.
Ce type de politique était devenue impossible à discuter avec les fractions (Anticapitalisme & révolution, l’Étincelle, Démocratie révolutionnaire, Socialisme ou barbarie) composant la plateforme C du congrès.
D’autre part, les divergences étaient devenues quasiment ingérables sur tout ce qui concerne les questions politiques sortant du rapport direct capital/ travail, révélant une vision ouvriériste des fractions. Ainsi, nous considérons que nous devons construire les mouvements écologiste, féministe, LGBTI et antiraciste pour eux-mêmes, en y défendant notre vision de classe et notre projet révolutionnaire, mais en comprenant qu’en eux-mêmes ils portent des éléments de subversion du système qui sont positifs pour le genre humain et les combats du prolétariat. L’écologie sans anticapitalisme n’est pas du jardinage, c’est un mode de radicalisation qui conduit à comprendre les conséquences du système et à les combattre.
Enfin, sur le plan interne, la situation était devenue intenable, avec des conflits très forts sur des sujets très importants. Ainsi, les fractions se sont opposées à la mise en place d’un travail spécifique sur les violences sexistes et sexuelles dans le parti, elles se sont opposées aux orientations proposées sur les luttes féministes et LGBTI. Enfin, leur fonctionnement parallèle permanent les constituait de fait en organisations séparées, avec leur propre recrutement, leurs propres cotisations, leurs propres publications.
Continuer le NPA
Alors la situation n’est pas simple, et il aurait été bien plus favorable pour la construction d’une organisation révolutionnaire solide de réussir à s’entendre. Mais les fractions ont refusé toute remise en cause de leur fonctionnement parallèle. Il a donc fallu en tirer les conséquences et prendre l’initiative, douloureuse, de la séparation. Mais la politique ne peut pas se construire sur des regrets, il faut considérer les éléments positifs qui nous entourent. Le NPA continue, autour de la colonne vertébrale qui le fait vivre depuis des années, autour de ses publications (hebdo, revue, site…), de ses porte-paroles reconnuEs, autour de la majorité de ses comités, de ses commissions. Il est à ce titre éclairant que la séparation ne change rien à notre capacité à publier notre matériel, tant les fractions étaient déjà extérieures au parti.
On peut espérer que les différents groupes révolutionnaires existants forment, comme le disait LO à une époque, différentes fractions d’un même parti révolutionnaire. Mais sans oublier que des milliers de révolutionnaires sont aussi en dehors des organisations de tradition trotskiste, à l’UCL, à Ensemble, dans la Gauche écosocialiste, à titre individuel dans La France insoumise, dans les organisations syndicales, parmi celles et ceux qui se mobilisent dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, dans les mouvements antiracistes et écologiques et que c’est dans l’action concrète que se produiront les dynamiques de construction d’un parti révolutionnaire large.
La situation du capitalisme est telle que nous sommes vraisemblablement à l’aube de nouvelles explosions sociales : c’est alors que nous devrons être capables de porter notre vision du capitalisme et du combat pour la révolution et le communisme, à l’aide de mots d’ordre transitoires, en étant capables de se lier aux luttes des masses. Espérons que tous les courants de la gauche anticapitaliste et révolutionnaire sauront alors, au lieu de se mettre en concurrence et de construire chacune leur petit groupe, dépasser leurs divergences pour défendre une politique commune, liée aux combats que le prolétariat sera réellement prêt à mener.