« La descente aux enfers », « les tontons flingueurs »... Il ne manque pas de formules ironiques pour décrire le psychodrame qui se déroule à l’UMP en attendant l’improbable retour du sauveur, l’homme providentiel dont quasi personne ne semble vouloir réellement.
Le 15 juin, la démission de Copé est devenue effective. Posant à la victime expiatoire des sales affaires du Président, Copé, la main sur le cœur, a prétendu vouloir « désormais faire de la politique autrement », en promettant « une cure de silence médiatique de plusieurs mois ». C’est toujours ça de pris, mais il devrait cependant déposer ses deux propositions de loi pour « demander la transparence de tous les partis politiques » : une manœuvre parlementaire classique pour donner le change et tenter de retourner les accusations dont il est l’objet. Il garde le regard fixé sur la ligne bleue de l’horizon présidentiel : « Je vais gagner en liberté pour porter des idées encore plus audacieuses pour la France », une obsession qui semble habiter bien des esprits à l’UMP et entretenir bien des haines. Sauf que désigner Copé à la vindicte ne suffit pas à sauver ce petit monde de la faillite politique et morale. Il est clair que l’UMP laisse le bénéfice du rejet et de l’effondrement du PS au FN qui passe devant elle aux élections européennes. Elle est sans programme autre que celui que le PS met en œuvre au gouvernement.
Un syndic de faillitePour éviter la liquidation immédiate, les caciques ont été obligés de constituer un syndic de faillite, le triumvirat provisoire Juppé-Fillon-Raffarin associé au vice-président délégué Luc Chatel promu secrétaire général par le dernier bureau politique la semaine dernière. Un attelage de compromis entre les multiples ambitions rivales. Alain Juppé, François Fillon, Xavier Bertrand ainsi que les quadras sont empêtrés dans une bataille sur deux fronts : tout faire pour empêcher le retour de Sarkozy et se neutraliser les uns les autres tout en tentant de prendre l’avantage. Cet équilibre incertain ne tient que grâce à l’hostilité rassembleuse à l’encontre de Sarkozy. Sauf que même une haine aussi solide ne suffira pas à maintenir la cohésion pour la simple raison que Sarkozy a du plomb dans l’aile. Son retour est de plus en plus improbable. Le soutien inconditionnel du couple redoutable Hortefeux-Morano, qui a reçu l’inattendu secours de Villepin que Sarkozy voulait « pendre à un croc de boucher » au moment de l’affaire Clearstream, ne suffira pas à assurer le retour de l’homme providentiel. Dans l’imbroglio Bygmalion, tout converge vers lui. Certes personne ne savait rien sauf Jérôme Lavrilleux, tous jurent avoir tout ignoré du système de fausses factures payées après la campagne 2012 pour près de 13 millions d’euros. Sauf qu’il est bien probable que le jeu de massacre continue avec de nouvelles révélations. Alors, si l’on ajoute la faillite morale à la faillite politique, on voit mal comment l’UMP pourrait survivre, prise entre un PS dont la politique se confond avec la sienne et le FN qui attire une partie croissante de l’électorat de droite. Un élément de plus de crise politique qui affaiblit l’ordre institutionnel.
Yvan Lemaitre