Macron et son gouvernement viennent donc d’annoncer leur intention de diviser par deux le nombre de visas accordés aux ressortissants d’Algérie et du Maroc, et de réduire de 30% les visas pour les TunisienEs. À entendre Gabriel Attal, la cause de cette décision brutale serait le fait que « ces pays n'acceptent pas de reprendre des ressortissants que nous ne souhaitons pas et ne pouvons pas garder en France ». En d’autres termes, les pays du Maghreb « ne jouent pas le jeu » des politiques d’expulsion de la France.
Cette annonce est scandaleuse à plus d’un titre. Typique des relations de domination que la France entretient avec ses anciennes colonies, elle s’apparente ainsi à un chantage, voire un diktat néocolonial : le vocabulaire de Gabriel Attal (« Il y a eu un dialogue, ensuite il y a eu des menaces. Aujourd'hui on met cette menace à exécution ») est là pour le confirmer.
Les conséquences que pourrait avoir cette mesure sont potentiellement désastreuses, en privant des centaines de milliers de personnes de la possibilité de se déplacer entre les pays du Maghreb et la France, alors que l’on sait que ces déplacements sont essentiels pour la vie économique, sociale et familiale de millions de gens, des deux côtés de la Méditerranée.
À moyen terme, cette décision risque en outre d’augmenter considérablement le nombre de personnes en situation d’illégalité, avec toutes les conséquences dramatiques que génèrent ces situations (exploitation renforcée au travail, difficultés d’accès aux soins, utilisation de « routes migratoires » particulièrement dangereuses, etc.).
Avec ces annonces, le gouvernement Macron confirme qu’il a fait le choix de s’inscrire dans une surenchère avec la droite extrême et l’extrême droite. Même le Figaro le dit, qui pose innocemment la question : « Est-ce l'effet Zemmour sur la campagne présidentielle ? Emmanuel Macron, en tout cas, durcit singulièrement le ton sur l’immigration. » Difficile en effet de voir dans cette décision, prise alors que le débat public est saturé par les discours racistes, islamophobes, anti-migrantEs, autre chose qu’une nouvelle expression du misérable et dangereux opportunisme politicien d’un pouvoir qui n’a de cesse de courir après l’extrême droite, quitte à renforcer la stigmatisation et les discriminations racistes.
Alors que les migrantEs continuent de mourir en Méditerranée (au moins 50 AlgérienEs ont péri en mer le week-end dernier), que la catastrophe climatique provoque de plus en plus de déplacements de populations et que l’extrême droite montre chaque jour un peu plus les dents, il n’est pas question de tergiverser. En finir avec les politiques migratoires racistes, qu’elles concernent la circulation, l’asile ou l’installation. Accueillir les migrantEs, touTEs les migrantEs, sans établir de hiérarchie entre « réfugiéEs politiques » et « migrantEs économiques ». Régulariser les sans-papiers, touTes les sans-papiers, sans opérer de tri entre « ceux qui travaillent » et « ceux qui ne travaillent pas ». Refuser de céder le moindre pouce de terrain aux théoriciens réactionnaires de « l’appel d’air » ou de la « concurrence déloyale ». Défendre une liberté de circulation et d’installation inconditionnelle, en rappelant qu’il ne s’agit de rien d’autre que d’une affaire de choix politiques et de lutte pour une réelle répartition des richesses. C’est ce que nous continuerons d’affirmer, sans céder à un air du temps nauséabond, et c’est ce que nous défendrons dans la campagne présidentielle.
Le 29 septembre 2021