Il était une fois une étudiante de la prestigieuse université américaine de Stanford qui décida d’abandonner ses études pour créer son entreprise, Theranos. Voilà un exemple de la bonne route selon l’évangile de Saint Macron. Onze ans plus tard, en 2015, elle a 32 ans et sa fortune a atteint 4,5 milliards de dollars, ce qui la situe parmi les 400 Américains les plus riches. Tout le monde l’adore (le Figaro Madame fait son éloge en avril 2015), elle est citée en exemple, et Obama la nomme ambassadrice d’un programme en faveur de l’« entreprenariat mondial ». Elle a inventé une méthode pour réaliser les tests sanguins, moins douloureuse et moins coûteuse que la traditionnelle prise de sang.
Elle en fait la promotion en disant que chacun disposera désormais d’un droit humain fondamental : la possibilité de détecter un risque de maladie, du cancer de la prostate au mauvais cholestérol, avant même l’apparition de symptômes. Des points de vente s’ouvrent à travers les États-Unis.
Mais en 2016, l’estimation de la fortune d’Élisabeth Holmes (tel est son nom) a été ramenée à zéro, et elle fait désormais l’objet d’enquêtes de l’agence de santé américaine, de l’organisme de supervision de la Bourse et d’un tribunal. Que s’est-il passé ? Des salariés de l’entreprise ont confié à des journalistes qu’ils s’interrogeaient sur les écarts de résultats entre leurs tests et ceux réalisés par des méthodes classiques. En novembre 2015, l’agence fédérale de contrôle des laboratoires commença alors à s’intéresser à la question : ses inspections montrent de graves infractions susceptibles de créer des « dangers immédiats pour la santé et la sécurité des patients » en induisant les médecins en erreur. Puis c’est l’avalanche, et la chute... Voilà donc où conduit à la fois l’absence de contrôle public sérieux sur les opérateurs médicaux et l’esprit de lucre des capitalistes.