En ce début d’année, dans les services hospitaliers, l’ambiance reste à la colère, même si elle se teinte d’amertume et parfois de découragement et de fatalisme.
La « troisième vague » de l’épidémie de Covid-19 est là. Les effets d’une vaccination efficace, ralentie par les errements de l’exécutif, ne pourront se faire sentir que dans quelques mois. Les prochaines semaines s’annoncent donc difficiles, en particulier dans les régions où le virus circule beaucoup. Dans ce contexte, le manque de perspectives et d’outils pour relancer la mobilisation se fait cruellement sentir.
Sur la brèche depuis un an
Depuis bientôt un an, les personnels hospitaliers sont sur la brèche pour donner les soins nécessaires, parfois très lourds, aux malades atteints par le virus, tout en continuant à soigner les autres patientEs. ils doivent remplir cette mission difficile dans un système hospitalier déjà au bord de l’implosion avant l’épidémie.
Portés par le soutien populaire, dont les applaudissements de 20 h étaient l’expression, les hospitalierEs ont fait face, tout au long du printemps 2020. Ils et elles ont réussi à en éviter l’effondrement du système de soins au prix de morts, dont le nombre reste encore inconnu, de traumatismes liés aux situations dramatiques vécues, d’un épuisement général physique et psychique. Ils et elles ont dû le faire dans les pires conditions : manque de moyens de protection, parfois pénurie de médicaments, mais surtout manque de lits et de personnel.
À la sortie du premier confinement, les personnels hospitaliers, sans illusion sur les promesses du pouvoir, ont espéré par leur mobilisation imposer, avec celles et ceux qui les avaient soutenus, que les choses changent enfin à l’hôpital. Les dizaines de milliers de manifestantEs du 16 juin, exigeant des moyens pour l’hôpital, en ont témoigné. Le « Ségur de la santé », signé par une partie des directions de syndicats de personnels, cautionné par le Collectif inter-hôpitaux qui avait été en pointe dans les mobilisations, a douché ces espoirs, et brisé l’élan de la mobilisation.
Aucun changement de cap de l’exécutif
En septembre, il a fallu se rendre à l’évidence : le virus était toujours là et la deuxième vague s’annonçait. Il est également devenu clair aux yeux de touTEs que le pouvoir n’avait aucune intention de donner des moyens supplémentaires à l’hôpital. Il n’a accordé que les 183 euros de revalorisation salariale qui, mesquinerie supplémentaire, ne sont pas versés aux personnels du social et du médico-social travaillant dans les mêmes établissements.
Les budgets d’austérité, l’absence de tout recrutement significatif les restructurations accompagnées de fermetures de lits et de services continuent. L’administration de l’hôpital reste aux mains des gestionnaires pour serrer la vis de l’austérité, et imposer le « management » du privé. Le vote par le Parlement de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 a confirmé tous ces choix. Loin de changer de cap, l’exécutif poursuit dans la même direction.
Face à tant de mépris, las de ne voir ni le bout du tunnel de l’épidémie ni celui de l’austérité, une partie des collègues a décidé de quitter les établissements. Les plus ancienEs, épuisés, n’ont pas envie de poursuivre dans ces conditions ; les nouveaux et nouvelles arrivéEs, à qui l’on ne propose souvent que des contrats précaires et des conditions de travail insupportables repartent souvent après quelques jours de travail. Ces départs ne font qu’amplifier la crise.
Construire les outils pour agir collectivement
Pourtant, une autre voie reste possible, celle de l’action collective des personnels et de celles et ceux qui les soutiennent. Des mobilisations comme celle de Toulouse à l’automne l’ont démontré. Elle a permis de réunir, autour de l’exigence de moyens pour la santé et l’hôpital et de lutte contre les mesures autoritaires et liberticides, prises au nom de la crise sanitaire, les personnels hospitaliers et de très nombreux secteurs sociaux.
De même, avec le soutien de structures syndicales combatives, la lutte des personnels du secteur social et médico-social pour obtenir les « 183 euros pour touTEs » a pu se fédérer et s’inscrire dans la durée.
Malheureusement l’affaiblissement du syndicalisme hospitalier et sa perte de crédibilité, la passivité de ses fédérations syndicales, l’absence de perspectives fournies par les collectifs existants comme le Collectif inter-hôpitaux, qui se fourvoient dans des négociations à froid avec le pouvoir, poussent les personnels au repli sur le service, sur les actions locales qui ne permettent pas de succès durable.
En ce début janvier, la seule perspective proposée est la date du 21 janvier, lancée par la seule CGT. Elle s’est élargie à Sud et aux collectifs (inter-urgences et inter-hôpitaux). Elle a rencontré pour l’instant un écho limité dans les établissements.La nécessité de construire des outils, unitaires, crédibles, rassemblant syndicats et collectifs, syndiquéEs et non syndiquéEs, pour mener la lutte au niveau élevé où le pouvoir place la barre, est plus urgente que jamais, tout comme l’est la convergence avec les autres secteurs sociaux en lutte contre les effets sanitaires et sociaux destructeurs de cette crise.