Publié le Lundi 27 juillet 2015 à 14h23.

Santé : Le DésOrdre médical

Entretien. Bernard Coadou est médecin à la retraite dans la région bordelaise, mais militant à plein temps…

Tu es poursuivi par le conseil de l’ordre des médecins. Peux-tu nous dire pourquoi et ce que tu risques ?

Après mon départ à la retraite en 2011, j’ai décidé en 2012 de ne plus payer volontairement de cotisation à l’ordre des médecins de Gironde qui, durant les 40 ans de ma pratique médicale, a été un obstacle à franchir et non une aide pour mon exercice. Nous avions bataillé dur contre ce syndicat obligatoire dans les années 80-90... La gauche avait promis de le supprimer, mais a renié ses promesses.

Je pensais que l’ordre des médecins de Gironde allait me laisser tranquille. Depuis 3 ans, ils me harcèle et tente de me faire plier, avec envoi d’huissier, etc. Je ne risque plus rien professionnellement car je n’ai plus d’exercice médical rémunéré, mais je dois en principe continuer à leur payer une cotisation, sauf si je déclare que je ne suis plus médecin... Ce qui m’empêcherait entre autres de poursuivre mon travail associatif au Sénégal (qui se fait depuis 1990).

Si tout le monde a entendu parlé de l’Ordre des médecins, on connaît moins ses activités, ses origines...

Il est né le 7 octobre 1940 et s’est comporté assez souvent « en harmonie » avec l’occupant nazi et le pouvoir pétainiste de l’époque. Il n’a pas du tout été un bouclier défenseur de l’éthique médicale alors bafouée. Nous avons de multiples exemples, et nous allons en découvrir d’autres en demandant d’ouvrir les archives ordinales.

Par la suite, il a réussi à se maintenir et à réunir en son sein de multiples pouvoirs : réglementaire, exécutif, judiciaire. Il se comporte en véritable lobby, apeurant les médecins et influençant les différents pouvoirs politiques qui se succèdent depuis des décennies.

Tu as fait partie d’un mouvement de médecins qui a contesté cet ordre sur la base d’une autre idée de la médecine...

Nous avons été des centaines à résister à cet authentique SOM (Syndicat obligatoire des médecins) qui s’est opposé à la médecine de groupe, à la libéralisation de la contraception et de l’avortement, à l’accès à la prévention et aux soins pour tous, plus récemment à la généralisation du tiers payant, etc. Il veut que nous financions sa propagande très souvent contraire à nos propres idées.

Qu’en est-il de cette résistance aujourd’hui ?

La résistance semblait éteinte mais il n’est pas impossible qu’une « étincelle » mette à nouveau « le feu à toute la plaine ». Nous ferons le point dans quelques mois.

La magnifique résistance des infirmierEs à leur ordre créé en 2006 (sur 600 000, ils sont 430 000 à ne pas payer la cotisation obligatoire) va très certainement aider à la démarche de « DésOrdre médical » qui redémarre : nous travaillons à établir des convergences.

La montée en puissance de mon comité de soutien (560 membres à ce jour, constitué par mes connaissances professionnelles ou associatives dont je rétablis le lien au jour le jour) et les prises de position d’organisations au moment de mon procès en fin d’année 2015, vont permettre que se tienne non seulement le procès du médecin retraité que je suis (sans espoir du côté judiciaire, le règlement c’est le règlement...) mais aussi celui de l’institution ordinale et de sa légitimité. D’ores et déjà, nous préparons pour le mercredi 7 octobre quelques initiatives publiques à Bordeaux... Nous en reparlerons !

Propos recueillis par Isabelle Ufferte

Animé par l’association « La Santé Un Droit Pour Tous », un comité de soutien « Pour la liberté associative et syndicale » est constitué. Pour plus d’informations, le rejoindre, etc. : par mail santedroitpourtous33@gmail.com, par courrier au 6 rue de Balaclava 33800 Bordeaux, par téléphone au 06 70 54 76 85.