Publié le Samedi 28 novembre 2009 à 11h01.

Bisphénol : pas œstrogène dans les biberons

Malgré sa dangerosité, le bisphénol est toujours utilisé dans les produits pour enfants.

Le bisphénol A est un œstrogène de synthèse. Depuis les années 1950, il est utilisé pour durcir le polycarbonate. Il est si couramment utilisé que 98% des américains en ont dans les urines, mais aussi dans le sang du cordon ombilical, le liquide amniotique. Il est classé «reprotoxique niveau 3», c'est à dire toxique pour la reproduction, par l’Union européenne. Il est pourtant utilisé dans les vernis intérieurs des boîtes de conserve, certains emballages alimentaires, les fontaines à eau, et aussi dans les biberons. Mais l'usure, le brossage, et surtout le chauffage libèrent dans le lait des nourrissons de grandes quantités de bisphénol. Des études de plus en plus nombreuses montrent que cet œstrogène de synthèse, un perturbateur endocrinien donc, favorise les cancers du sein et de la prostate, la baisse de la production des spermatozoïdes, les problèmes d’attention et d'agressivité chez les enfants, l’obésité, le diabète, les problèmes thyroïdiens. Il participe très probablement à la montée très préoccupante des cancers hormono-dépendants, seins, prostate, à laquelle nos sociétés font face.

Le 18 octobre 2008, sous la pression des organisations de consommateurs, le Canada interdit le bisphénol dans les biberons, assiettes et bols pour enfants. À l'opposé de ce principe de précaution, en 2006, l'autorité européenne de sécurité des aliments, l'Efsa, remonte les doses journalières admissibles de 10 à 50 microgrammes par kilo de poids corporel et par jour.

Pourtant de nombreuses études ont montré des effets néfastes pour des doses très inférieures. Et surtout, on sait maintenant que pour les perturbateurs endocriniens, notamment chez le nourrisson en pleine différenciation sexuelle, à doses extrêmement faibles, les variations de doses comptent parfois autant que les doses elles-mêmes.

Le débat fait rage. En 2005, 90% des études financées sur fonds publics retrouvent des effets néfastes. 0% de celles financées sur fonds privés! Une remarque qui n'est pas anodine, quand on sait que de nombreux experts de l'Efsa ont travaillé ou sont financés par l'industrie agroalimentaire. Pas d'autre solution que d'interdire le bisphénol alimentaire, notamment pour les plus petits.

En France, au nom du principe de précaution, souvent à l'initiative d'élus verts, comme à Paris, Clermont ou Nantes ou du NPA, comme à Canteleu, des conseils municipaux prennent position contre le bisphénol dans les biberons. Interdiction des biberons au bisphénol dans les crèches, information aux parents dans les journaux municipaux, distribution de biberons en verre incassable, donc sans bisphénol, aux nouveaux parents.

Il y a quinze jours, sous la pression du Réseau environnement santé, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, qui avait elle aussi conclu à l’absence de risques du bisphénol, accepte de revoir le dossier.

Une bataille qui doit d’abord nous faire avancer vite vers l’interdiction du bisphénol dans tous les biberons, jouets et produits alimentaires pour enfants.

Frank Cantaloup