Publié le Lundi 9 janvier 2012 à 10h58.

Hôpitaux : une dette illégitime

En octobre 2011, la faillite de la banque Dexia attire l’attention sur l’ampleur de la dette des hôpitaux publics dont 20 % serait composée de produits dits « à risque ».

Mais les emprunts « toxiques » ne sont que la partie la plus visible de l’endettement massif des hôpitaux, qui atteint aujourd’hui, selon la Cour des comptes, 21,7 milliards d’euros.

Si Sarkozy ne manque pas une occasion de dénoncer cet endettement et d’exiger le « retour à l’équilibre » budgétaire, il se garde bien de poser la question trop « risquée » : d’où vient la dette ?

C’est à partir de 2003 que la dette des hôpitaux s’envole, avec le plan dit « Hôpital 2007 ».Faisant le constat (juste) de la vétusté des équipements hospitaliers (taux de vétusté de 68 % !), ce plan engage une politique d’investissements massifs. Mais refusant de revenir sur les causes – l’insuffisance de financement des hôpitaux –, la solution apportée – le recours à l’emprunt auprès des banques – aboutit à la situation actuelle. Le vieillissement des équipements hospitaliers est la conséquence directe des politiques de restriction budgétaire menées au cours des années 1980 et 1990 au nom de la « maîtrise des dépenses de santé », par tous les gouvernements.

Pour préserver leurs budgets de fonctionnement et en particulier payer le personnel, les directeurs d’hôpitaux n’ont eu d’autre solution que de réduire au minimum la part de leurs budgets consacrées à la rénovation et à l’équipement.

Parallèlement, l’État et la Sécurité sociale ont de moins en moins accompagné financièrement les projets immobiliers, ou l’achat de matériels coûteux.

La politique de « relance de l’investissement » choisie en 2003, n’a pas consisté à financer les équipements nécessaires mais pour l’essentiel à les aider à emprunter auprès des banques, faisant ainsi exploser leur dette. Cet endettement s’est d’autant plus aggravé que le même plan gouvernemental a mis en place un système de tarification défavorable à l’hôpital public qui précarise les recettes et fragilise encore plus les établissements. Enfin, c’est la privatisation en 1993 par le gouvernement Balladur (Sarkozy étant ministre du Budget) du Crédit local de France et sa fusion avec le Crédit communal de Belgique qui a donné naissance à la banque Dexia, convertie aux logiques du marché et de la spéculation, avec pour conséquence les « emprunts toxiques ».

Insuffisance de financement public pour exonérer le patronat du financement de la protection sociale, obligation d’avoir recours aux banques privées engagées dans des opérations financières spéculatives, la dette hospitalière a les mêmes causes que la dette des États. Elle relève de la même thérapeutique : l’annulation de cette dette illégitime, un financement de l’hôpital public et de l’ensemble du système de santé en fonction des besoins, grâce à des cotisations sociales payées par les employeurs, un système bancaire public permettant aux établissements de financer leurs investissements.

Jean-Claude Delavigne

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