Vendredi 11 septembre, Jean Castex lançait un appel « solennel » au « sens des responsabilités de chacune et de chacun ». Face à la reprise de l’épidémie de coronavirus, le gouvernement Macron ne lâche rien de sa stratégie morbide : maintenant que le masque est obligatoire presque partout, il est temps de retourner bosser comme avant, voire plus qu’avant ; charge à chacune et chacun de se protéger, individuellement.
Les annonces pleuvent pour inciter les entreprises à remettre les salariéEs au travail. L’activité économique doit repartir, à n’importe quel prix...
Au prix de la mise en danger des plus vulnérables
Un décret du 31 août a réduit de 11 à 4 les catégories de personnes vulnérables pouvant être placées en activité partielle pour éviter d’avoir à s’exposer au risque de transmission du virus. La solution n’était déjà pas terrible puisqu’elle engendrait une perte de rémunération. Cette maigre protection est désormais levée, notamment pour les personnes diabétiques de moins de 65 ans, les femmes enceintes de plus de trois mois ou encore les personnes obèses ou atteintes de maladies respiratoires chroniques ou ayant des antécédents cardiovasculaires ! Et le Covid-19 ne sera automatiquement reconnu comme maladie professionnelle que pour les soignantEs et non-soignantEs ayant eu besoin d’un apport d’oxygène, les autres devront passer par un comité de deux médecins.
Le gouvernement a décidé, sous la pression des employeurs, de réduire de 14 à 7 jours la durée d’isolement au prétexte d’un « constat d’échec » d’une quatorzaine insuffisamment respectée. Mais en l’absence d’un arrêt maladie dérogatoire, sans jour de carence et maintien à 100 % de la rémunération, qui a les moyens de s’isoler réellement pendant 14 jours ? Le gouvernement dénonce les comportements récalcitrants au lieu de donner à touTEs les moyens de protéger sa santé.
À grand renfort d’argent public
L’argent qui pourrait servir à protéger les plus faibles, à avoir des tests et des laboratoires d’analyse en nombre suffisant pour dépister massivement et dans les temps, à proposer des conditions d’isolement sans perte de salaire, va dans les poches des capitalistes.
L’activité partielle, avec laquelle les salariéEs subissent des pertes importantes de salaires, n’étant payéEs qu’à 70 % de leur taux horaire brut, continue d’être la clef de voûte de la politique gouvernementale d’aide aux entreprises. Celles-ci vont pouvoir signer des accords d’activité partielle de longue durée (APLD). Les robinets de l’argent public sont grand ouverts et les moyens de lutte contre la fraude à l’activité partielle sont loin d’être suffisants, avec à peine 2 000 agentEs de l’inspection du travail, déjà très occupés sur de nombreux autres fronts.
Tout ce qui peut aider les capitalistes à maintenir leurs profits tout en faisant payer la crise aux salariéEs est favorisé. Élisabeth Borne, ministre du Travail, déclarait le 10 septembre dans la presse : « On s’attend à de nouveaux PSE dans les prochaines semaines […]. De mars à août, on en a comptabilisé 345 contre 231 sur la même période en 2019, il faut donc continuer à proposer de nouveaux dispositifs de soutien : prêts garantis par l’État, fonds de solidarité, activité partielle. » Et la ministre de se réjouir de la signature d’APLD dans des entreprises comme Safran, constructeur d’avions de guerre.
Toujours aux mêmes de faire des efforts
La mode est également aux « APC », ces accords de « performance collective » qui ont légalisé et étendu les possibilités de mettre en œuvre le chantage à l’emploi. Avec les APC, les salariéEs doivent accepter des baisses de salaire ou des obligations de mobilité sans contreparties réelles. Le gouvernement prétend qu’il s’agit de donnant-donnant mais, d’après une première étude menée en 2018, seulement 3 % des accords prévoient des efforts de la part employeurs et seulement 10 % avec des contreparties chiffrées en termes d’investissements ou de maintien d’emploi. Ces accords pourraient permettre de ne pas avoir à légiférer en matière de temps de travail, si toutes les entreprises s’en saisissent pour augmenter la durée du travail.
Jean Castex a annoncé très clairement le 26 août, devant les grands patrons français, qu’il allait « prolonger, amplifier et pérenniser » les mesures exceptionnelles qui sont venues « simplifier la vie » des employeurs à la faveur de l’état d’urgence sanitaire, au détriment des salariéEs. Il se garde bien de préciser quelles dérogations instaurées en droit du travail il entend pérenniser. La machine est lancée et les annonces interviendront à l’automne.
Des résistances à coordonner
Face à ce gouvernement qui donne tous les moyens au patronat, des résistances se dessinent.
Dans certaines entreprises, les salariéEs refusent les accords de chantage à l’emploi, comme chez Derichebourg Aeronautics services où FO avait signé une baisse très importante de rémunération et où près de 10 % des salariéEs ont refusé l’accord.
Dans d’autres entreprises, des grèves sont lancées pour dire « stop » à la dégradation des conditions de travail et aux pertes de rémunération liées à l’activité partielle. Chez ArcelorMittal Dunkerque, les salariéEs en grève ont refusé le blocage des salaires et le respect des pauses devenues impossibles à prendre à cause du sous-effectif occasionné par l’activité partielle.
Les résistances restent encore isolées. Mais la journée du 17 septembre pourrait être un premier point d’appui pour une contre-offensive globale. Face à un gouvernement qui prend la responsabilité de nous mettre en danger pour sauvegarder les profits, à nous de prendre nos affaires en main, de nous regrouper, dans les grèves, dans les mobilisations et de décider d’un plan de bataille pour mettre le pays à l’arrêt !