Publié le Jeudi 14 mai 2015 à 14h07.

Loi Macron : quand le Sénat sévit

Sans surprise, le Sénat, ce vieux machin, a considérablement durci les dispositions de la loi Macron, en particulier celles consacrées au droit du travail. Ainsi, l’amendement dit Sephora relatif au travail en soirée a été approuvé, et ce dernier est même étendu aux 640 zones touristiques déjà existantes dans notre pays.

Comment s’étonner ensuite de l’adoption, avec la bienveillance de Macron, d’un amendement « Fnac » autorisant les commerces de détail de biens culturels à ouvrir chaque dimanche ? Les libraires apprécieront, et ce d’autant que cette nouvelle dérogation de droit au repos dominical n’oblige pas les patrons à faire appel au volontariat, tout comme à majorer le salaire versé ce jour-là ! La concurrence avec Amazon qui motive cette mesure a beau jeu quand on sait que le groupe Fnac affiche de bons résultats... y compris via l’exploitation de son site internet. Les patrons de la librairie indépendante s’étranglent eux d’une mesure qui vise à les faire disparaître en leur imposant une concurrence qu’ils ne pourront pas suivre.Pour les ouvertures dominicales permanentes, le Sénat conforte les possibilités de contournement des organisations syndicales, largement opposées, en introduisant un recours au référendum en l’absence d’accords. Quant aux entreprises de moins de 11 salariéEs, elles seront exemptées de tout accord, donc de compensations !

Toujours plus loin, toujours plus fort...Dans un hémicycle quasi-désert, les opposantEs au texte ont certes donné de la voix, mais en vain : les sénateurs communistes, écologistes et de rares socialistes comme Marie-Noëlle Lienemann n’ont même pas pu faire retenir leurs amendements de repli, car beaucoup de socialistes ont voté sans broncher avec ceux du centre et de l’UMP. Cette entente a été encore plus forte avec le ministre, heureux de voir ses idées libérales consacrées, ce qui a encouragé la droite sénatoriale à se lâcher en votant par exemple la mise en place d’accords de compétitivité offensifs ou en doublant le seuil nécessaire à l’élection du comité d’entreprise. Quand on aime, on ne compte pas !Le summum est atteint avec la mise en place d’une commission chargée pendant un an de réformer le code du travail, l’objectif étant d’accroître les possibilités de dérogation au dit code par voie d’accord collectif, et de « simplifier les règles applicables à l’exécution et à la rupture du contrat de travail, en rendant en particulier certains droits progressifs ». Rien que ça !

Mais qu’est ce qu’on attend ?Le mardi 12 mai, jour du votre du texte, les unions régionales CGT, FO, FSU et Solidaires ont appelé, tout comme le CLIC-P, a un rassemblement devant le Sénat, ce qui explique que les salariéEs du commerce étaient nombreux, dont des libraires de Gibert et de la Fnac.Le même jour se réunissait l’intersyndicale nationale composée de ces mêmes organisations, qui peine à donner une suite sérieuse à la mobilisation réussie du 9 avril, alors que la loi Macron, ainsi que celle relative au dialogue social, sera votée cet été…Pourtant, avec la grève des collèges de ce 19 mai, celle prévue le 21 à l’AP-HP contre la remise en cause des 35 heures, et les multiples conflits qui agitent des dizaines d’entreprises du privé tant sur les salaires que contre les licenciements, organiser la convergence des luttes est impératif. Le retrait de la loi Macron, nous le gagnerons par notre mobilisation, pas en misant sur les déchirements du PS lors de son congrès ou sur un vote négatif des « frondeurs » au moment du retour de la loi à l’Assemblée nationale fin juin.

LD