Publié le Mercredi 27 avril 2016 à 12h13.

Loi travail : Gattaz pleure la bouche pleine, Valls joue les durs !

Rien n’irait plus entre le patronat et le gouvernement concernant la loi travail, à en croire les déclarations tonitruantes de Gattaz, le patron du Medef, lors d’une conférence de presse mardi 19 avril...

«Il faut arrêter le délire ». C’est avec ces mots que Gattaz a demandé que cesse l’horrible pression qui pèse actuellement sur le patronat français, qui comme chacun le sait, est particulièrement mal traité par le gouvernement en place ! Il a carrément demandé la réécriture d’ici à trois semaines de la loi travail (qu’il trouvait pourtant si bien il y a peu de temps...) en menaçant de ne pas participer au prochain round de négociations sur l’assurance chômage prévu en mai.

Dans le projet gouvernemental, tout va pourtant absolument dans le sens des intérêts patronaux, mais le Medef demande le retrait de trois points du texte : le mandatement syndical obligatoire pour les petites entreprises sans représentant du personnel, c’est-à-dire l’obligation de négocier des accords d’entreprise avec des salariéEs mandatés par un syndicat ; le compte personnel d’activité (CPA) et la surtaxation des CDD.

La voix des petites et moyennes entreprises, particulièrement hostiles à certaines dispositions de la loi travail, est donc désormais directement amplifiée par Gattaz afin de mettre la pression maximale sur le gouvernement d’ici à la fin de la discussion de la loi à l’Assemblée. En effet, les PME et les TPE (les moyennes et petites entreprises) souhaitent la réintroduction de mesures qui leur étaient très favorables : la possibilité pour les apprentis mineurEs de travailler jusqu’à quarante heures par semaine, l’introduction d’un barème pour les indemnités prud’homales et la négociation du passage au forfait-jour directement avec un salariéE.

La surtaxation des CDD rendrait la loi travail « insupportable »

En réalité, il n’y a rien de nouveau derrière cette prétendue nouvelle surtaxation des CDD, peut-être même rien du tout, car rien de précis n’a été confirmé, et Valls n’a peut-être annoncé que du vent... Car d’abord, la surtaxation des CDD courts est déjà en place depuis juillet 2013 et l’application de l’ANI (accord national interprofessionnel). Elle est discutée avec le patronat au niveau de l’Unedic qui gère l’assurance chômage. Le point a été mis à l’ordre du jour bien avant les annonces de Valls, dans le cadre des futures négociations sur l’assurance chômage. « On devait de toute façon discuter de la taxation des CDD dans nos débats sur l’assurance chômage », a rappelé un responsable de la CFTC. La seule chose que le gouvernement pourrait ajouter serait de rendre obligatoire cette surtaxation. Mais il n’est même pas certain que le grand patronat y voie le moindre problème... Car elle s’accompagne d’allégements de taxes sur les CDI, et les plus grosses entreprises ont, en général, plutôt recours à l’intérim qu’aux CDD.

La chanson dit que « les histoires d’amour finissent mal en général »... Eh bien, il n’est pas sûr que cela s’applique à celle qui dure depuis quatre ans maintenant entre le gouvernement socialiste et le patronat, même si Valls a cru bon de rappeler à Gattaz les 40 milliards du pacte de responsabilité, et qu’il ne fallait quand même pas trop abuser ! Tout cela participe au petit jeu désormais bien rodé entre les deux : l’un fait mine d’être écorché, l’autre lui demande d’être enfin raisonnable... Mais qui croyez-vous qui rit toujours à la fin ? Le seul jour où l’on verra vraiment pleurer Gattaz et tous les patrons, c’est quand le monde du travail et la jeunesse auront réussi à leur faire ravaler au fond de la gorge toutes leurs attaques, et en premier lieu la casse du code du travail !

Marie-Hélène Duverger