Face à l’épidémie du COVID-19, le gouvernement a constitué une « réserve sociale » à l’image de la « réserve sanitaire », faisant ainsi appel au volontariat pour « soutenir l’activité des établissements sociaux et médico-sociaux » et « assurer la continuité de la prise en charge de leurs publics ».
À l’heure où les établissements de formation ont fermé mais tentent d’assurer selon les directives une certaine « continuité pédagogique », de nombreux étudiantEs en travail social sont rappelés sur le terrain pour venir renforcer les équipes et pallier le manque de personnel déjà réduit à peau de chagrin dans de nombreux établissements avant l’épidémie de coronavirus.
En effet, face aux effets de la crise sanitaire et du confinement, les structures sociales et médico-sociales sont particulièrement en difficulté, percutées par les politiques d’austérité menées depuis de nombreuses années. Les salariéEs des EHPAD avaient déjà dénoncé leurs conditions de travail et d’accueil des personnes âgées. Dans les centres d’hébergement, les foyers de l’enfance, le manque de places et de moyens est aussi criant. Peu avant le confinement, les salariéEs d’un foyer d’urgence parisien étaient en grève pour dénoncer cela. Et les exemples abondent.
ÉtudiantEs en travail social, une main-d’œuvre gratuite ?
Avec la « réserve sociale » le gouvernement joue la carte de la culpabilisation et de la vocation, lorsqu’il rappelle qu’il est du « devoir et de la responsabilité des travailleuses et travailleurs sociaux de maintenir l’accompagnement des plus fragiles en cette période de crise ». Une note du ministère des Solidarités demande aux étudiants de « s’engager » que ce soit sous la forme de CDD mais aussi de manière bénévole sous la forme de stages. En pressant leurs étudiantEs à participer à cette réserve, les directions d’écoles peuvent mettre à disposition une main-d’œuvre gratuite (convention de stage) alors que les conditions sanitaires minimales pour protéger les salariéEs et les personnes accompagnées sont rarement assurées. Un appel qui tombe à point nommé lorsque certains collègues sur le terrain s’emploient à faire valoir leur droit de retrait pour inciter les directions à réagir lorsqu’elles sont parfois réticentes à mettre en œuvre des conditions d’accueil et de travail sécures.
Dans ces conditions, envoyer sur le terrain des étudiantEs en formation est particulièrement irresponsable, face à un public davantage « fragilisé » par le confinement. De plus, avec l’ordonnance du 25 mars 2020, le gouvernement autorise l’abaissement du niveau de qualification comme des taux d’encadrement, tout en permettant l’augmentation des taux d’occupation. Ces mesures dites exceptionnelles vont renforcer la logique de rentabilité du secteur et l’expérience de l’état d’urgence nous a déjà montré que l’exceptionnel pouvait devenir permanent.
Faisons payer les vrais responsables de cette catastrophe !
Quelles sont les causes de la « vulnérabilité » des personnes accompagnées ? Qui est responsable de leur précarité ? Sûrement pas les personnes sans-abri, les personnes migrantes, ou encore les étudiantEs qui la dénoncent et se mobilisent. Cette crise n’est pas de notre fait ! Les capitalistes sont les responsables des mort.es et de la détresse sociale grandissante : depuis des années, ils détricotent le droit du travail, détruisent le service public, réduisent les budgets de la recherche médicale (même pour le coronavirus !), au nom du dogme de l’économie de marché. Pour améliorer la vie des personnes que nous accompagnons, renversons ce système économique injuste dans lequel les profits passent avant nos vies.
Pour faire entendre nos revendications, organisons-nous !
S’engager oui, c’est souvent ce qui nous mène vers ces métiers, mais pas à n’importe quel prix, celui des conditions de travail, de salaires décents, et surtout pas au dépend des personnes que nous accompagnons ! Nous ne sommes ni des héros ni des héroïnes ! Une « reconnaissance symbolique » ne nous donnera pas les moyens de rester en bonne santé, de vivre dignement… Il est vital que les travailleurEs, avec ou sans emploi, et les étudiantEs s’organisent pour combattre les politiques néolibérales.