Malgré les attaques de la droite contre la prétendue démagogie des propositions du PS, celles-ci entérinent bien les précédentes contre-réformes qui ont déjà vidé de son contenu la retraite à 60 ans. Le Parti socialiste a donc fini par annoncer ses propres propositions sur les retraites. Elles vont de l’amélioration de l’emploi des seniors, à la retraite « à la carte » et à l’accroissement des recettes par l’augmentation des cotisations et la taxation de certains revenus du capital, des bonus, des stock-options, de la participation et de l’intéressement. Mais, bien sûr, ce qui a perturbé les conditions du débat public naissant sur les retraites est le maintien proclamé de l’âge légal de la retraite à 60 ans et le report au-delà de 2020 d’une éventuelle augmentation du nombre d’annuités de cotisation nécessaires. Il n’en fallait pas plus pour que la droite dénonce la démagogie du PS et son goût immodéré pour les augmentations d’impôts. La contre-offensive gouvernementale a immédiatement été lancée sur le thème : le PS prétend « taxer le capital », mais comme cela ne suffira pas, ce sont les « couches moyennes » qui vont payer… Les propositions du PS sont loin de constituer, du point de vue du monde du travail, une réponse à la hauteur. En particulier, préconiser la retraite « à la carte » ne peut conduire qu’à individualiser les situations et, donc, à ruiner les garanties collectives. La création d’un compte retraite individualisé est d’ailleurs l’un des moyens préconisés par les experts patronaux pour saper les bases d’un système solidaire fondé sur les droits collectifs. Mais le refus de toucher à l’âge légal – laborieusement obtenu par l’aile gauche du PS – constitue une brèche dans le dispositif prévu par le gouvernement et le Medef et montre l’absence de consensus à ce sujet, même parmi les « partis de gouvernement ». Et, du coup, cela légitime le débat et la recherche d’autres solutions : si même le PS dit qu’on peut éviter de modifier la limite des 60 ans… Or, bien que le gouvernement ait choisi de distiller au compte-goutte les éléments de sa « réforme » dans l’espoir de désamorcer tout mouvement social, il apparaît de plus en plus que ses principales « solutions » sont bien le report de l’âge légal et une nouvelle augmentation du nombre d’annuités. Pour autant, il ne faut pas se tromper sur l’objectif réellement visé : compte tenu du niveau de chômage global et, plus particulièrement, de celui des seniors, le but d’un report de l’âge légal de la retraite et, surtout, de l’augmentation des annuités n’est pas principalement de faire « travailler plus longtemps », mais de laminer les pensions via le système de décote. Cette remarque permet de relativiser quelque peu le caractère radical des propositions du PS ! En effet, pour justifier son report au delà de 2020 de toute mesure d’âge, les dirigeants socialistes évoquent l’augmentation d’ores et déjà prévue des annuités. Intéressant ! Ils entérinent donc définitivement les réformes Balladur (1993) et Fillon (2003) qu’ils avaient – très mollement ! – combattues. Et dont ils continuent, à juste titre, de dénoncer les effets sur « le niveau des pensions qui ne cesse de se dégrader ». Mais, on l’aura compris, il n’est plus question de revenir sur les dispositions imposées par les différents gouvernements de droite qui ont déjà vidé le droit à la retraite à 60 ans d’une grande partie de son contenu… Mais, c’était encore trop pour certains responsables socialistes, toujours prompts à débusquer ce qui, dans le discours tenu par le PS, pourrait s’écarter de l’orthodoxie social-libérale. Et Dominique Strauss-Kahn s’est donc rappelé au bon souvenir de ses camarades en fustigeant le « dogme » de la retraite à 60 ans… François Coustal